Henry Kissinger

Henry Kissinger
Illustration.
Henry Kissinger en 2009.
Fonctions
56e secrétaire d'État des États-Unis

(3 ans, 3 mois et 29 jours)
Président Richard Nixon
Gerald Ford
Gouvernement Administration Nixon
Administration Ford
Prédécesseur William P. Rogers
Successeur Cyrus Vance
8e conseiller à la sécurité nationale
des États-Unis

(6 ans, 9 mois et 14 jours)
Président Richard Nixon
Gerald Ford
Gouvernement Administration Nixon
Administration Ford
Prédécesseur Walt Rostow
Successeur Brent Scowcroft
Biographie
Nom de naissance Heinz Alfred Kissinger
Date de naissance
Lieu de naissance Fürth (Allemagne)
Nationalité Américaine
Parti politique Parti républicain
Conjoint Ann Fleisher (1949-1964)
Nancy Maginnes (depuis 1974)
Diplômé de City College of New York
Université Harvard
Profession Diplomate

Signature de Henry Kissinger

Henry Kissinger
Prix Nobel de la paix de 1973
Secrétaires d'État des États-Unis

Henry Kissinger (prononciation américaine [ˈkɪsɪndʒər]), né Heinz Alfred Kissinger (prononciation allemande [haɪnts ˈalfʁɛt ˈkɪsɪŋɐ]) le à Fürth en Allemagne, est un diplomate américain, politologue et consultant en géopolitique.

Allemand de naissance, de confession juive, il émigre aux États-Unis en 1938 pour fuir les persécutions nazies et est naturalisé en 1943. Interprète pour les services secrets américains durant la Seconde Guerre mondiale en Europe, il devient pour une courte période administrateur de la ville de Krefeld.

De retour aux États-Unis en 1946, il étudie à Harvard avant de se lancer en politique. D'abord conseiller à la sécurité nationale américaine, il devient secrétaire d'État du gouvernement républicain de Richard Nixon, poste qu'il occupe ensuite sous Gerald Ford. Promoteur de la Realpolitik, il joue un rôle important dans la diplomatie américaine au cours de la guerre froide de 1968 à 1977, en étant notamment, en 1973, l'un des artisans de la signature des accords de paix de Paris. Il inspire la politique de la Détente avec l’Union soviétique et joue un rôle crucial dans le rapprochement avec la Chine à partir de 1971.

Kissinger reçoit le prix Nobel de la paix en 1973 pour son action dans la résolution de la guerre du Viêt Nam. Ce prix est notamment marqué par la démission de deux membres du comité, en guise de protestation. Figure médiatique, souvent décrit comme brillant, il reste un personnage controversé, sa politique étrangère lui crée de nombreuses inimitiés, aussi bien du côté de la gauche pacifiste, que de certaines associations humanitaires et de la droite anticommuniste.

Il est fondateur de Kissinger Associates et en assure la présidence. Entreprise de conseil en relations internationales, elle a pour clients des firmes multinationales qu'elle assiste dans leurs négociations de contrats commerciaux avec des États. Il a par ailleurs écrit une douzaine d'ouvrages sur l'histoire diplomatique et les relations internationales.

Biographie

Enfance et formation

Henry Kissinger est né en Bavière à Fürth, dont il est plus tard devenu citoyen d'honneur, dans une famille juive allemande[1]. Son père, Ludwig Kissinger (né en 1887 et décédé en 1982), était instituteur. Sa mère, Paula Stern Kissinger (1901-1998), était femme au foyer. Henry a un frère cadet, nommé Walter[2]. Le nom Kissinger est issu du choix fait en 1817 par l'arrière-arrière-grand-père d'Henry, Meyer Löb, de changer de patronyme. Il se serait pour cela inspiré du nom de la ville allemande de Bad Kissingen[3]. En 1938, sa famille, fuyant les persécutions nazies, part pour New York. Il est naturalisé américain le [4].

Écolier à Manhattan, il ne perd pas son accent allemand, malgré une assimilation rapide de la culture américaine, du fait d'une certaine timidité enfantine qui l'empêche de prendre la parole en classe[5],[6]. Il suit les cours du soir à la George Washington High School (en) pour travailler dans les usines le jour. Il entre ensuite dans le supérieur au City College of New York où il étudie la comptabilité.

Expérience militaire

En 1943, il arrête temporairement ses études pour recevoir un entrainement militaire élémentaire à Camp Croft (Spartanburg, Caroline du Sud), à la suite de sa naturalisation la même année. Il est d'abord envoyé au collège Lafayette en Pennsylvanie pour étudier l'ingénierie mais le programme est annulé et Kissinger est réassigné à la 84e. Il y fait la connaissance de l'universitaire Fritz G. A. Kraemer (en), comme lui immigré allemand. Ce dernier remarque l'aisance d'Henry avec l'allemand et son intellect peu commun. Il s'arrange alors pour qu'il soit envoyé à la section de renseignement militaire de la division. Kissinger part ensuite en Europe avec sa division alors que la Seconde Guerre mondiale bat son plein, et est volontaire pour assurer des missions de renseignement non sans risques, notamment durant la bataille des Ardennes[7],[8].

À la suite de l'avancée de l'armée américaine sur le territoire allemand, Kissinger est assigné à la dénazification de la ville de Krefeld du fait du manque de germanophones dans l'équipe de renseignement de la division[9]. Ses origines et sa connaissance de la société allemande lui sont utiles dans sa tâche d'administrateur militaire de cette cité ouvrière : il parvient à supprimer tous les symboles nazis et mettre en place une nouvelle administration civile en seulement huit jours[10]. Il est ensuite muté au Counter Intelligence Corps avec le grade de sergent. Il prend la tête d'une équipe à Hanovre chargée de pourchasser notamment les officiers de la Gestapo, mission pour laquelle il reçoit la Bronze Star[11]. En juin 1945, Kissinger passe commandant d'un détachement du CIC dans l'arrondissement de la Bergstraße dans le Land de Hesse. Alors qu'il possède l'autorité et les pouvoirs nécessaires pour procéder à des arrestations immédiates, il prend toujours soin de ne pas en abuser et de ménager la population locale[12].

En 1946, Kissinger est réassigné en tant que professeur à l'European Command Intelligence School à Camp King, où il continuera de travailler même après son départ de l'armée[13],[14].

Cursus universitaire et débuts en tant que conseiller

Henry Kissinger obtient en 1950 une licence en science politique à l'université Harvard avec la mention summa cum laude après avoir suivi les cours de William Yandell Elliott[15]. Il obtient son master en 1952. La même année il devient consultant auprès du directeur du Psychological Strategy Board (en) en marge de ses études[16]. En 1954, il devient docteur en science politique à l'université Harvard, sa thèse sur la diplomatie entre 1812 et 1822 (Peace, Legitimacy, and the Equilibrium (A Study of the Statesmanship of Castlereagh and Metternich)) étant réputée la plus longue de l'histoire de l'université. Il y devient alors professeur au département des études gouvernementales, dont il devient directeur adjoint en 1957.

Henry Kissinger est également nommé consultant à l'Operations Coordinating Board du Conseil de sécurité nationale en 1955[16]. La même année et en 1956 il est directeur d'étude des Affaires étrangères et Armes nucléaires au Conseil des relations étrangères. Il écrit l'année suivante un livre sur le sujet, Nuclear Weapons and Foreign Policy, qui met notamment en avant les avantages de ce qui sera appelé la riposte graduée à celle des « représailles massives »[17].

Ayant une grande ambition politique, il entretient des relations avec Nelson Rockefeller[18], alors gouverneur de New York et conseille occasionnellement Dwight Eisenhower, John Fitzgerald Kennedy et Lyndon Baines Johnson. Kissinger devient ensuite conseiller du candidat Richard Nixon pour l'élection de 1968 qui le nomme conseiller à la sécurité nationale. Du point de vue théorique, c'est un fervent partisan de la Realpolitik, comme il l'expose dans son œuvre majeure, Diplomatie, parue en 1995. Il y oppose le réalisme politique à l'idéalisme wilsonien dont les néo-conservateurs se veulent être les héritiers.

Il est ensuite administrateur de Rockefeller Brothers Fund (en)[16] et de Gulfstream Aerospace, directeur du Programme d'études de Défense de Harvard de 1958 à 1971, directeur du Séminaire international de la même académie de 1951 à 1971. Il conseille aussi de nombreuses agences gouvernementales telles l'Operations Research Office, l'Arms Control and Disarmament Agency ou le département d'État des États-Unis ainsi que des laboratoires d'idées comme Rand Corporation[16].

Situation matrimoniale

Henry et Nancy Kissinger au Metropolitan Opera en 2008.

Henry Kissinger est d'abord marié à Ann Fleischer, avec qui il a eu deux enfants, Elizabeth et David[19]. Sa fille devient médecin[19] et son fils est cadre supérieur à NBC Universal avant d'être nommé à la tête de Conaco, société de production de Conan O'Brien. Henry divorce en 1964. Dix ans plus tard, il se remarie avec Nancy Maginess[20], avec qui il vit toujours. La communauté juive réagit mal et lui reproche d'avoir épousé une goy et surtout de s'être marié un samedi[21][réf. à confirmer], le 30 mars 1974. Ils partagent leur temps entre New York et Kent dans le Connecticut.

Administration Nixon et prix Nobel de la paix

Henry Kissinger en entretien avec Mao Zedong, Zhou Enlai est en arrière-plan.

Lorsque Richard Nixon prend ses fonctions, Henry Kissinger est nommé conseiller à la sécurité nationale en 1969, puis en 1973 secrétaire d'État.

Dans l'équipe de Richard Nixon, Henry Kissinger met au point la politique de la détente avec l'Union soviétique. Il négocie ainsi le traité SALT I limitant le nombre de bombes nucléaires des deux superpuissances. De même, en juin et en , pour la première fois, il entre secrètement en contact avec la Chine communiste avec la complicité du président du Pakistan Yahya Khan qui permet à l'avion de Kissinger de partir vers Pékin depuis Islamabad ; puis il accompagne Nixon lors de sa visite officielle (la première d'un président américain) en 1972. Des documents récemment déclassifiés montrent qu'il était alors fortement question de Taïwan[réf. nécessaire].

Ayant promis, lors des élections de 1968, une issue rapide au problème de la guerre du Viêt Nam, l'administration américaine doit faire face à une escalade du conflit. Celle-ci est marquée par la décision américaine de bombarder illégalement des positions du Việt Cộng au Laos et au Cambodge (opération Menu). À la suite des accords de Paris du , jetant les bases du retrait américain du Viêt Nam, il reçoit le prix Nobel de la paix, conjointement avec le Vietnamien Lê Đức Thọ qui le décline car selon lui « […] la paix n'a pas réellement été établie »[réf. nécessaire].

Les réactions sont mitigées. Le journal italien La Stampa a écrit que l'attribution de ce prix à Kissinger constituait « un encouragement à ceux qui veulent déclarer la guerre pour mieux la stopper[22]. » Françoise Giroud, dans l'hebdomadaire L'Express écrivit qu'il s'agissait d'un « prix Nobel de l'humour noir ». Plusieurs commentateurs ultérieurs dans le cadre de rétrospectives déclarent que Kissinger reste un récipiendaire très contestable du Nobel[23],[24],[25].

Richard Nixon et Henry Kissinger accueillant la première ministre israélienne Golda Meir (à g.) à la Maison Blanche le 1er novembre 1973.

Pendant la guerre israélo-arabe de 1973, alors que Nixon est enlisé dans le scandale du Watergate et ne peut plus présider le Conseil de sécurité nationale, c'est Kissinger qui assure la direction militaire et diplomatique. Le 13 octobre, malgré l'opposition de John Schlesinger, secrétaire d'État à la Défense, Kissinger décide d'envoyer un soutien matériel massif à Israël et organise un pont aérien. Le 24 octobre, alors que l'URSSS menace d'intervenir militairement pour empêcher l'encerclement de l'armée égyptienne, il fait mettre en alerte les forces nucléaires américaines, ce qui amène les Soviétiques à accepter à l'aube du lendemain, alors que Nixon « dormait d'un profond sommeil », la proposition d'un cessez-le-feu. Enfin, comme l'OPEP, solidaire de la coalition arabe, avait décidé un embargo pétrolier contre les États-Unis, Kissinger fait étudier par John Schlesinger un projet d'occupation des champs pétroliers saoudiens[26].

Il se montre très hostile au président socialiste chilien Salvador Allende. Dès le 27 juin 1970, lors d’une réunion du Conseil de sécurité nationale, il déclare : « Je ne vois pas pourquoi nous devrions rester tranquilles quand un pays devient communiste à cause de l'irresponsabilité de son propre peuple[27]. » Dans son livre Les Crimes de M. Kissinger, le journaliste Christopher Hitchens accuse Kissinger d'avoir pris part au coup d'État du 11 septembre 1973 au Chili dirigé par le général Pinochet contre le gouvernement de Salvador Allende. Des éléments déclassifiés ont montré que la CIA avait soutenu un projet de coup de force en 1970, ce que Kissinger détaille lui-même dans ses mémoires, mais ce dernier affirme que les États-Unis ne fomentaient plus de tels projets en 1973 et qu'ils n'ont joué aucun rôle dans le putsch de 1973. La commission Church du Sénat des États-Unis, qui a enquêté sur les opérations au Chili, dit dans son rapport n'avoir trouvé aucune preuve d'implication directe des États-Unis[28].

Lorsque éclate le scandale du Watergate, Kissinger est interpellé comme possible complice du système d'espionnage intérieur mis en place par Nixon. Lors d'une conférence de presse à Vienne le , il déclare qu'il ne lui sera plus possible de conduire la politique étrangère des États-Unis si sa personnalité et sa crédibilité sont mis en doute. Il reçoit de nombreux témoignages de confiance de sénateurs et représentants, aussi bien républicains que démocrate : les deux camps reconnaissent qu'il n'est pas exactement « Monsieur Propre » mais qu'il n'est pas impliqué dans les méfaits et violations de droits orchestrés par la Maison Blanche. Le , le Sénat rend un rapport déclarant que le rôle de Kissinger dans l'affaire des écoutes n'était pas de nature à l'exclure de la direction des Affaires étrangères[29]. Son adjoint le diplomate Richard Holbrooke écrit dans Foreign Policy que Kissinger n'était ni « le seul homme propre dans une clique de putois » ni « un membre de la bande parmi d'autres » mais qu'il avait dû accepter un compromis pour pouvoir « jouer un rôle extraordinaire sur la scène mondiale[30] ».

Administration Ford

Henry Kissinger, Richard Nixon, Gerald Ford et Alexander Haig en réunion à la Maison-Blanche.

À la suite de la démission de Richard Nixon, Henry Kissinger reste à son poste de secrétaire d'État mais quitte celui de conseiller à la sécurité nationale, sous l'autorité du nouveau président Gerald Ford en 1974.

Kissinger produit un mémorandum important concernant la croissance démographique et ses effets géopolitiques. Achevé le et adopté en , il conseille des organisations mondiales comme la Banque Mondiale ainsi que les politiques américaines. Cela reste secret jusqu'à 1989[31],[32].

En , Gerald Ford et Henry Kissinger rencontrent le président de l'Indonésie Soeharto. Ils auraient approuvé, à la suite de la déclaration d'allégeance de quatre parties du Timor oriental à l'Indonésie, l'imminente annexion par celle-ci de ce territoire, en vue d'unifier l'île de Timor, dont les Indonésiens possèdent déjà l'autre moitié. Au cours des 24 années d'occupation indonésienne qui ont pris fin en 1999, entre 102 800 et 183 000 personnes sont mortes. Kissinger a toujours affirmé son ignorance à l'égard de cette invasion, à l'encontre de documents soutenant le contraire[33].

En 1976, Kissinger revient sur la politique de détente avec les régimes « blancs » d'Afrique (établie en 1969). En échange d'une relaxation des relations avec l’Afrique du Sud sur les questions relatives au Sud-Ouest africain/Namibie et à l’apartheid, il se rend à Pretoria où il demande à John Vorster, le Premier ministre sud-africain, de faire pression sur Ian Smith, le Premier ministre de Rhodésie afin d’obtenir de lui le retour à la légalité internationale et l’application du principe de majorité One man, one vote (« Un homme, un vote ») en Rhodésie. Il obtient gain de cause et en , Ian Smith cède sur le principe du gouvernement dirigé par la majorité noire, ouvrant ainsi la voie à une solution politique en Rhodésie[réf. nécessaire].

Mais la victoire du démocrate Jimmy Carter aux élections présidentielles de ne lui permet pas de poursuivre les pourparlers en vue d'un règlement négocié (elles seront reprises par son successeur Cyrus Vance et déboucheront sur un échec)[réf. nécessaire].

Henry Kissinger quitte son poste de secrétaire d'État en [34],[35].

Influence ultérieure

Henry Kissinger est l'un des hommes-clé de l'élection présidentielle de 1980. En effet, il drainera vers le candidat républicain, Ronald Reagan, une part importante de l'intelligentsia américaine au nom du new leadership (« nouvelle hégémonie ») que les États-Unis doivent retrouver pour contrer l'Union soviétique. Pour cela, il utilisera tout son réseau universitaire et celui des laboratoires d'idées qu'il connaissait bien[36].

Par la suite, Henry Kissinger joue un rôle relativement mineur dans les gouvernements américains qui suivent (ayant de mauvaises relations avec George H. W. Bush), participant à de nombreux groupes politiques, des commissions, etc. Il dirige la firme de consultant Kissinger Associates depuis 1983 ; à ce sujet, il refuse de donner la liste de ses clients ou le montant de ses revenus : « tout ce que je peux vous dire, c'est que mes associés et moi-même refusons tout État étranger comme client et toute activité de lobbying auprès de l'administration américaine[1]. » Il est notamment embauché par la multinationale Walt Disney pour la conseiller sur ses liens commerciaux avec la Chine[37].

Henry Kissinger exprime régulièrement son point de vue en tant que consultant ou lors de discours, d'articles ou de livres[38].

Il soutient en 1998 l'ancien dictateur chilien Augusto Pinochet à la suite de l'arrestation de ce dernier à Londres. De passage à Paris le 28 mai 2001, il reçut la visite de la brigade criminelle, qui venait lui remettre une convocation judiciaire. Alors qu'il devait se présenter au palais de justice comme témoin dans l’affaire de la disparition de cinq Français au Chili, Henry Kissinger, vraisemblablement impliqué dans la création du plan Condor, quitta précipitamment la France le lendemain[39].

En 2002, George W. Bush le nomme à la commission d'enquête sur les attentats du 11 septembre 2001[40], qu'il quitte plutôt que de publier sa liste de clients comme cela lui est demandé pour répondre à des accusations de conflits d'intérêts[41],[42],[43].

Lors des élections présidentielles américaines de 2008, il déclare que John McCain et Barack Obama feraient la même politique étrangère une fois au pouvoir car les États-Unis ont des intérêts que ces deux hommes ne peuvent ignorer[44]. Il conserve une influence sur la politique étrangère de l'administration Obama[45],[46].

En 2012 il publie un livre sur l'histoire de la Chine[47],[48], et rencontre le président de la République française François Hollande[49].

En 2014, il est opéré du cœur à l’hôpital presbytérien de New York[50],[51].

Kissinger conserve une influence dans les relations américano-russes, et a notamment fait la connaissance de Vladimir Poutine en 1990. En 2016, la presse rapporte qu'il pourrait être appelé par la Maison Blanche à jouer un rôle de médiateur dans l'affaire de l'influence qu'aurait eue la Russie sur les élections présidentielles américaines dont Donald Trump est sorti vainqueur[52].

Groupes et Instituts

Kissinger Associates, l'entreprise qu'il dirige, est membre du Council of the Americas, un groupe d'affaires pro-libre échange[53].

Kissinger est un des dirigeants du Kissinger Institute on China and the United States, une division dédiée aux relations sino-américaines du laboratoire d'idées Woodrow Wilson International Center for Scholars[54]. Kissinger est aussi avec le milliardaire David Rockfeller et Zbigniew Brzezinski, un des membres importants de la commission trilatérale, un groupe regroupant les hommes d'affaires et les politiciens les plus influents au monde, et visant à favoriser la doctrine mondialiste.

Henry Kissinger est membre permanent du club Bilderberg[55],[56],[57] et de l'Institut Aspen[58].

Il est également membre du Bohemian Club[59], du Center for Strategic and International Studies[60] et du Council on Foreign Relations[61].

Controverses

Figure médiatique, influent au sein de l'élite américaine, souvent décrit comme brillant, Henry Kissinger reste un homme extrêmement controversé. Accusé de crime de guerre, sa politique étrangère lui a créé de nombreuses inimitiés, aussi bien du côté de la gauche pacifiste et d'associations humanitaires que de la droite anticommuniste[62].

Kissinger : juif antisémite ?

Dans des transcriptions de propos dévoilés par la suite par le département d'État des États-Unis, il déclare devant un responsable de la Maison-Blanche : « Y a-t-il une seule communauté dans le monde qui soit aussi égoïste que les juifs ? [63],[64] »

Le , Kissinger déclare : « Soyons réalistes : l'émigration des juifs d'Union soviétique n'est pas dans les objectifs de la politique étrangère américaine. Et s'ils envoient des Juifs dans des chambres à gaz en Union soviétique, ce n’est pas le problème des États-Unis. Peut être un problème humanitaire »[65],[66],[67],[68]. Depuis le dévoilement de ces enregistrements secrets, il a présenté des excuses, tout en déclarant que son propos avait été sorti de son contexte[65].

Amérique latine

À propos de l'opération Condor, organisée par plusieurs dictatures sud-américaines pour éliminer physiquement et torturer leurs opposants politiques jugés « subversifs », la journaliste Marie-Monique Robin écrit :

« Ainsi que le prouve l'enquête minutieuse de mon confrère John Dinges, le gouvernement américain, et en particulier son secrétaire d'État Henry Kissinger, est parfaitement informé des méthodes et objectifs de l'opération Condor, quasiment dès sa création, mais ne bouge pas[69]. »

Dirigeant d'une commission bipartisane sur l’Amérique centrale, tout en reconnaissant des massacres « moralement inacceptables » perpétrés par l’armée guatémaltèque, il recommande la reprise de l'aide militaire au Guatemala, ce qu'approuve l’administration Reagan[70].

Coup d’État au Chili

Il est cité comme témoin dans des enquêtes sur des crimes de guerre par des juges au Chili et en Espagne, au sujet du coup d'État du 11 septembre 1973 au Chili[71].

De passage à Paris le , il reçoit la visite au Ritz de la brigade criminelle qui lui remet une convocation. Invité à comparaître au palais de justice comme témoin dans l’affaire de la disparition de cinq Français au Chili, Henry Kissinger quitte la France le lendemain[72],[73].

Kissinger n'a pas déféré au juge et l'ambassade américaine l'invite à s'adresser au département d’État des États-Unis[72].

Guerre du Viêt Nam

Plusieurs essais lui reprochent la première phase du bombardement secret du Cambodge par les États-Unis, de 1969 à 1973, lors de la guerre du Viêt Nam. Selon Ben Kiernan, 50 000 à 150 000 ont été tués dans les bombardements aériens[74]. Des convois nord-vietnamiens empruntaient la « piste Ho-Chi-Minh », à travers des forêts cambodgiennes peu peuplées, pour ravitailler le Viêt-Cong au sud Viêt Nam. Les Américains, en guerre contre le Viêt-Cong, bombardèrent ces convois lors de leur passage illégal à travers le Cambodge.

Pour la seule année 1973, l’aviation américaine a largué davantage de bombes, contre les Khmers rouges qui assiègent Phnom Penh, sur le centre du Cambodge que sur le Japon pendant toute la Seconde Guerre mondiale. D'après les services de renseignement américain, ces bombardements massifs et leurs conséquences sur la population cambodgienne ont permis aux Khmers rouges de recruter nombre de nouveaux combattants[75].

Invasion du Timor oriental

On lui a reproché son soutien formel au président indonésien Suharto durant l'invasion et l'occupation du Timor oriental par l'Indonésie qui a provoqué entre 102 800 et 183 000 morts[33],[76].

Voir aussi

Publications

Originales en anglais

  • 1957 : A World Restored: Metternich, Castlereagh and the Problems of Peace, 1812-22 (ISBN 0-395-17229-2) (thèse de doctorat).
  • 1957 : Nuclear Weapons and Foreign Policy, 1984 (ISBN 0-86531-745-3).
  • 1961 : The Necessity for Choice: Prospects of American Foreign Policy (ISBN 0-06-012410-5).
  • 1965 : The Troubled Partnership: A Re-Appraisal of the Atlantic Alliance (ISBN 0-07-034895-2).
  • 1969 : American Foreign Policy: Three essays (ISBN 0-297-17933-0).
  • 1979 : The White House Years, National Book Award, History (ISBN 0-316-49661-8).
  • 1981 : For the Record: Selected Statements 1977–1980 (ISBN 0-316-49663-4).
  • 1982 : Years of Upheaval (ISBN 0-316-28591-9).
  • 1985 : Observations: Selected Speeches and Essays 1982–1984 (ISBN 0-316-49664-2).
  • 1994 : Diplomatie ((en) Diplomacy) (ISBN 0-671-65991-X).
  • 1999 : Years of Renewal (ISBN 0-684-85571-2).
  • 1999 : Kissinger Transcripts: The Top Secret Talks With Beijing and Moscow (Henry Kissinger, William Burr) (ISBN 1-56584-480-7).
  • 2001 : Does America Need a Foreign Policy?: Toward a Diplomacy for the 21st century (ISBN 0-684-85567-4).
  • 2002 : Vietnam: A Personal History of America's Involvement in and Extrication from the Vietnam War (ISBN 0-7432-1916-3).
  • 2003 : Crisis: The Anatomy of Two Major Foreign Policy Crises: Based on the Record of Henry Kissinger's Hitherto Secret Telephone Conversations (ISBN 0-7432-4910-0).
  • 2011 : On China, New York, Penguin Press, 2011 (ISBN 978-1-59420-271-1).
  • 2014 : World Order, New York, Penguin Press, 2014 (ISBN 978-1594206146).

Traduites en français

  • Le Chemin de la paix [« A World Restored: Metternich, Castlereagh and the Problems of Peace, 1812–22 »], t. 1, Denoël, , 441 p.
  • À la Maison-Blanche, 1968-1973 [« The White House Years »], t. 1, Fayard, (ISBN 978-2-213-00817-2).
  • À la Maison-Blanche, 1968-1973 [« The White House Years »], t. 2, Fayard, (ISBN 978-2-213-00825-7).
  • Les Années orageuses [« Years of Upheaval »], t. 1, Fayard, , 1493 p. (ISBN 978-2-213-01148-6).
  • Les Années orageuses [« Years of Upheaval »], t. 1, Fayard, (ISBN 978-2-213-01187-5).
  • Diplomatie [« Diplomacy »], Fayard, , 860 p. (ISBN 978-2-213-59720-1).
  • Les années de renouveau : Le dernier volume des mémoires [« Years of Renewal »], Fayard, , 1047 p. (ISBN 978-2-213-60752-8).
  • La Nouvelle Puissance américaine [« Does America Need a Foreign Policy?: Toward a Diplomacy for the 21st century »], Fayard, , 386 p. (ISBN 978-2-213-61546-2).
  • Sortie de crise : Kippour 1973, Vietnam 1975 [« Crisis: The Anatomy of Two Major Foreign Policy Crises »], Fayard, , 547 p. (ISBN 978-2-213-62407-5).
  • De la Chine [« On China »] (trad. de l'anglais), Paris, Fayard, , 576 p. (ISBN 978-2-213-65506-2).
  • L’Ordre du monde, Fayard, , 400 p. (ISBN 978-2-213-68512-0, lire en ligne).

Bibliographie

  • (fr) Christopher Hitchens, Les Crimes de Monsieur Kissinger, Saint-Simon, 2001, 203 pages (ISBN 2-9516597-0-9).
  • (fr) Maurice Girodias, Président Kissinger, Tristram, 2009 (ISBN 2907681737).
  • (fr) Charles Zorgbibe, Kissinger, Éditions de Fallois, 2015 (ISBN 978-2877068864).
  • (fr) Gérard Araud, Henry Kissinger : le diplomate du siècle, Tallandier, 2021, 336 p.
  • (fr) Jérémie Gallon, Henry Kissinger. L'Européen, Gallimard, 2021.
  • (it) Amedeo Benedetti, Lezioni di politica di Henry Kissinger. Linguaggio, pensiero ed aforismi del più abile politico di fine Novecento, Gênes, Erga, 2005 (ISBN 88-8163-391-4).
  • (de) Stephan Fuchs, Dreiecksverhältnisse sind immer kompliziert. Kissinger, Bahr und die Ostpolitik, Hambourg, Europäische Verl.-Anst., 1999 (ISBN 3-434-52007-4).
  • (en) Larry Berman, No peace, no honor. Nixon, Kissinger, and Betrayal in Viêt Nam, New York, Free Press, 2001 (ISBN 0-684-84968-2).
  • (en) Jussi Hanhimäki, The Flawed Architect. Henry Kissinger and American foreign policy, Oxford, Oxford University Press, 2004 (ISBN 0-19-517221-3).
  • (en) Seymour Hersh, The Price of Power: Kissinger in the Nixon White House, 1983.
  • (en) Holger Klitzing, The Nemesis of Stability. Henry A. Kissinger’s Ambivalent Relationship with Germany, WVT, Trier, 2007 (ISBN 978-3-88476-942-3).
  • (en) Robert D. Schulzinger, Henry Kissinger. Doctor of diplomacy, Columbia Univ. Pr., New York, 1989 (ISBN 0-231-06952-9).
  • (en) Robert Dallek, Nixon and Kissinger: Partners in Power, 2007.
  • (en) Walter Isaacson, Kissinger : A Biography, 2005 (ISBN 978-0743286978).

Musique

  • Henry Kissinger est une chanson comique des Monty Python, composée par Eric Idle. Elle apparaît dans l'album Monty Python's Contractual Obligation (1980) puis l'album Monty Python Sings.
  • Lettre à Kissinger est une chanson de Julos Beaucarne centrée autour de l'exécution du chanteur Victor Jara lors du coup d'État du 11 septembre 1973 au Chili que Kissinger a, selon le chanteur, soutenu[77],[78]. Elle apparaît dans les albums Chanteur indignés, Chandeleur Septante Cinq et Au « théâtre de la ville » janvier septante sept.

Filmographie

  • Nixon, film américain de Oliver Stone.
  • 11'09"01 - September 11, court métrage de Ken Loach sur un exilé chilien vivant à Londres.
  • Le cas Kissinger : La face cachée d'un magicien, documentaire de Alex Gibney et de Eugene Jarecki.
  • L'incontournable Monsieur Kissinger, documentaire de Stephan Lamby.
  • Il apparaît en 2001 dans le documentaire L'Ami américain, l'Amérique contre De Gaulle de Patrick Jeudy.
  • En 2002 dans le faux documentaire Opération Lune, de William Karel.
  • Dans l'épisode La Guerre c'est l'Enfer de Futurama.
  • Dans l'épisode $pringfield (Or, How I Learned to Stop Worrying and Love Legalized Gambling) des Simpson.
  • En 2018, sous les traits de Kirk Bovill dans le film sur Dick Cheney, Vice, d'Adam McKay.

Récompenses et distinctions

Décorations

Décorations américaines

Décorations étrangères

Notes et références

  1. « Henry Kissinger, 73 ans, ne vit que pour (et de) la diplomatie. Il publie un livre : coups de griffe et autojustification sur le Viêt-nam. Toujours pas diplomate », sur liberation.fr, .
  2. (en) « The Kissinger Saga: Walter and Henry Kissinger by Evi Kurz: review », sur The Telegraph, .
  3. (de) « Die Kissingers in Bad Kissingen », Bayerischer Rundfunk,‎ (lire en ligne).
  4. (en) Harvey Starr, Henry Kissinger : Preceptions of International Politics, University Press of Kentucky, , p. 19.
  5. (en) Walter Isaacson, Kissinger: A Biography, New York, Simon & Schuster, 1992 (ISBN 0-671-66323-2).
  6. « Bygone Days: Complex Jew. Inside Kissinger's soul », Jerusalem Post,‎ (lire en ligne).
  7. Isaacson, pages 39 à 48.
  8. Michel Hubin, « La compagnie « G » dans les combats de 1944 - Un GI nommé Henry Kissinger », (consulté le ).
  9. (en) Harvey Starr, Henry Kissinger : Preceptions of International Politics, University Press of Kentucky, , p. 20.
  10. Isaacson, page 48.
  11. Isaacson, page 49.
  12. Isaacson, page 53.
  13. Isaacson, page 55.
  14. (en)« Henry Kissinger at Large, Part One », PBS,‎ (lire en ligne).
  15. Theodore Draper, « Little Heinz And Big Henry », New York Times,‎ (lire en ligne, consulté le ).
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  19. (en) « Henry the Second », sur people.com, .
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  27. « Baie des Cochons ou « Opération Mangouste » ? », Medelu,‎ (lire en ligne)
  28. « Was the United States DIRECTLY involved, covertly, in the 1973 coup in Chile? The Committee has found no evidence that it was. » dixit le rapport Church.
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  32. Cathy Châtel et François Moriconi-Ébrard, « Les petites villes : un objet (géo)politique ? » sur Territoire en mouvement, 2016.
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  75. « Cambodge. Mais où sont les complices des Khmers rouges ? », sur Courrier international
  76. Voir par exemple les propos de Noam Chomsky à ce sujet.
  77. « Victor Jara : la justice du Chili ouvre les yeux », sur Libération.fr, .
  78. Last Night in Orient- LNO ©, « Lettre à Kissinger · Julos Beaucarne », sur Last Night in Orient (consulté le )
  79. (en)Honorary Doctorates, Prize and Awards, université Waseda, consulté sur http://www.waseda.jp le 19 septembre 2012.
  80. « Monsieur Henry Kissinger », sur site officiel du Mouvement olympique.
  81. maville.com, « Le prix Tocqueville remis à Henry Kissinger au Sénat », sur cherbourg.maville.com, (consulté le ).
  82. « À la Maison-Blanche », sur Fayard.
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  84. (en) « Dr. Henry A. Kissinger », sur Mount Union University.
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  87. (en) « Honorary Knights Commander of the Order of the British Empire: Henry Kissinger, Bill Gates, Spike Milligan, Rudy Giuliani, James D. Watson », sur Barnes and Noble.

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