Constance II

Constance II
Empereur romain
Image illustrative de l’article Constance II
Majorina de Constance II frappée à Alexandrie entre 348 et 350, au revers FEL TEMP REPARATIO (le Retour des Temps Heureux) figurant un Romain vainqueur d'un cavalier barbare à terre.
Règne
César : -
Auguste : -
(24 ans, 1 mois et 25 jours)
Période Constantinienne
Précédé par Constantin Ier (310-337)
Co-empereur Constantin II (337-340)
Constant Ier (337-350)
Usurpé par Magnence (350-353)
Magnus Decentius (350-353)
Népotien (350)
Vétranion (350)
Sylvain (355)
Julien (360-361)
Suivi de Julien (361-363)
Biographie
Nom de naissance Flavius Julius Constantius
Naissance à Sirmium (Mésie)
Décès à Mopsueste (Cilicie)
Inhumation Église des Saints-Apôtres à Constantinople
Père Constantin Ier
Mère Fausta, fille de Maximien
Fratrie Crispus
Constance
Hélène
Constantin II
Constant Ier
Épouse (1) Constantia
(2) Eusébie
(3) Faustina
Descendance Flavia Maxima Constantia, née posthume
(épouse Gratien)[Note 1]

Constance II (Flavius Julius Constantius en latin), né le à Sirmium et mort le à Mopsueste, est un empereur romain chrétien du Bas-Empire.

Né sous le règne de son père, l'empereur Constantin Ier, Constance est élevé le au rang de César, soit vice-empereur, de même que ses deux frères, Constant Ier et Constantin II, et son cousin Flavius Dalmatius. Envoyé en Gaule en 332, puis en Syrie, il intervient ainsi en Arménie, en 335, royaume dont la couronne est promise à son cousin Flavius Hannibalianus. Apprenant la mort de Constantin en 337, et peu désireux de partager l'Empire à cinq, les trois frères s'accordent pour encourager la garde impériale à massacrer Dalmatius, Hannibalianus et la quasi-totalité de leur famille puis se font acclamer Augustes, soit empereurs, et se répartissent le monde romain le . Constance II obtient ainsi la partie orientale, menacée par les Sassanides du roi des rois Chapour II. En 340, Constantin II est tué par Constant Ier, qui se place à la tête de l'Occident romain, avant d'être assassiné à son tour, en 350, par un de ses généraux, Magnence, qui usurpe le titre impérial. Temporairement soulagé de sa guerre contre les Sassanides, Constance II l'affronte le à Mursa et le vainc en 353. Deux ans plus tard, l'élimination du général usurpateur Silvain maintient Constance II comme souverain incontesté du monde romain.

Constance II, qui est devenu plus méfiant vis-à-vis de ses généraux après les guerres civiles et qui doit gérer à la fois le front sassanide, où la guerre reprend, et les Gaules, qui sont envahies par les barbares, décide de se faire épauler par un vice-empereur. N'ayant pas de fils, il jette son dévolu sur un des deux survivants du massacre familial, son cousin Constantius Gallus, qu'il envoie en Syrie, dès 351. Mais, ce dernier s'étant discrédité par sa brutalité, Constance le rappelle et le fait exécuter en 354. Parti prendre la direction des armées d'Orient, Constance envoie son dernier parent encore en vie, le jeune frère de Gallus, Julien, servir comme César en Gaule en 355. C'est depuis la Mésopotamie, où l'issue de la guerre sassanide demeure incertaine treize ans après le début du conflit, que Constance apprend, en 360, que son César, après avoir libéré les Gaules, a usurpé le titre d'Auguste. Constance refuse de reconnaître l'usurpation mais, malade, doit interrompre sa marche militaire à Mopsueste en Cilicie, où il meurt le , après avoir désigné Julien, jadis son rival, comme son successeur.

Le règne de Constance II est marqué par la consolidation des réformes de Constantin Ier, notamment sur le plan financier et administratif, mais aussi par une inflexion vers une nouvelle conception du pouvoir assez proche de celle des futurs empereurs byzantins et marquée par le goût pour la pompe et par la montée en puissance des eunuques et des notaires. Élevé dans la parole du Christ, Constance II veille également à renforcer l'Église face aux cultes païens et à la purger de ses divisions en tentant d'unifier un dogme en pleine élaboration. Bien plus que les autres décisions de Constance II, ce sont principalement ces questions religieuses que retiennent les historiens anciens.

Le fils de Constantin

L'enfant à la pourpre

Constantin Ier, qui accède à la pourpre en 306, s'impose à l'issue d'une longue guerre civile comme seul maître de l'Empire, de 324 à 337. Il semble être le premier empereur chrétien.

Constance II est né sous le nom de Flavius Julius Constantius le à Sirmium dans le diocèse de Mésie en Illyrie[1]. Il est le fils de l'empereur régnant, Constantin Ier, qui avait usurpé le titre impérial en revêtant le manteau de pourpre des empereurs en 306, et été reconnu Auguste soit empereur légitime en 310. Constance II est par conséquent né sous le règne de son père, événement rarissime dans un Empire où la succession héréditaire n'a jamais fait figure d'évidence depuis les temps fondateurs du principat d'Auguste[2]. Il est le troisième fils de l'empereur, après Crispus, fils de Minervina, et Constantin II, qui, comme Constance II est le fils de Fausta, seconde femme de Constantin Ier. Constance II est donc fils mais aussi petit-fils d'empereur, à double titre, puisqu'il descend à la fois de Constance Chlore par son père et de Maximien Hercule par sa mère. Un quatrième fils, Constant Ier, lui aussi fils de Fausta, vient compléter la fratrie en 320. Ces enfants reçoivent une éducation soignée confiée à des précepteurs chrétiens, qui selon André Piganiol les transforme en « fanatiques qui tremblent pour leur salut »[3].

Désireux de mettre fin aux guerres civiles fréquentes, conséquences d'une absence de règle de succession précise, et en rupture avec le modèle tétrarchique dressé par Dioclétien dont il avait montré les limites, Constantin I escompte fonder sa propre dynastie basée sur un principe d'hérédité[4]. Ainsi tous les fils de Constantin sont selon l'ordre de naissance honorés successivement du titre de César, soit vice-empereur : Crispus et Constantin II en 317, Constance II le , Constant Ier le et même leur cousin Flavius Dalmatius, fils du censeur Flavius Dalmatius, lui-même demi-frère de l'empereur, en 335[4]. À l'âge de sept ans, à Nicomédie, Constance II reçoit donc la pourpre des mains de son père et devient ainsi l'un des plus hauts dignitaires de l'Empire. Sa position au sein de la famille impériale est même confortée lorsqu'au début de l'année 326 Constantin fait exécuter son fils aîné Crispus dans les thermes de Pula. La mère de Constance, Fausta, accusée d'adultère avec son beau-fils défunt, est elle aussi mise à mort peu de temps après, à Trèves[5].

Jusqu'en 332, du fait du jeune âge de Constance II, son nouveau titre impérial demeure sans responsabilités réelles. À partir de cette date, Constantin Ier, l'estimant plus mûr, décide de l'associer plus étroitement à son action. De retour d'une nouvelle campagne contre les Goths, il partage ainsi avec ses deux fils aînés, Constantin II et Constance II, le prestige de la victoire[6]. Constance II semble ensuite avoir été envoyé en Gaule tandis que son frère combat les barbares sur la frontière danubienne[1]. Constantin II remplace ensuite son frère cadet sur la frontière rhénane lui permettant de se rendre en Syrie où l'empereur Constantin craint la reprise du conflit contre les Sassanides[6].

Depuis la victoire de Galère en 298, les relations sont demeurées globalement pacifiques entre les deux Empires frontaliers. La question de la souveraineté sur le royaume d'Arménie, que les Romains considèrent comme leur protectorat, a ainsi été réglée à leur profit lors du dernier conflit. Toutefois, les revendications sassanides sur le territoire ne sont pas abandonnées, de sorte que l'armée romaine doit mener quelques opérations d'ampleur limitée dans le royaume dès 325 dans un contexte de tensions croissantes[7]. Cette démonstration de force ne décourage pas les Sassanides puisqu'en 334, le roi des rois sassanide Chapour II envahit l'Arménie avec pour objectif de détrôner le roi Khosrov III d'Arménie et de le remplacer par son frère pour ancrer le royaume aux côtés de son Empire[7]. Averti de la situation, notamment par une ambassade de chrétiens arméniens craignant les persécutions, Constantin Ier charge son fils Constance II de la situation en 335[8]. Après quelques revers initiaux pour les armées romaines, le frère du roi des rois, promis au trône d'Arménie, est tué. Chapour II adresse alors à Constantin Ier, en 336, des propositions de paix qui sont acceptées[9].

La succession constantinienne

Constance II prend à partir de 335 le contrôle des diocèses d'Asie, du Pont et d'Orient, bien que Flavius Hannibalianus ait reçu lui aussi la promesse d'obtenir des territoires dans la région du Pont en plus de son royaume d'Arménie.

Durant ce temps, Constantin Ier continue d'associer ses Césars à son œuvre. Leurs noms sont associés à tous ses triomphes, pour leur garantir l'allégeance de l'armée, et ils sont ainsi nommés Sarmaticus, Gothicus, Alamannicus et Germanicus[7], soit vainqueurs des Sarmates, des Goths, des Alamans et des Germains. La propagande impériale gravée sur les monnaies nouvellement émises les désigne comme les « Très Nobles Césars » et les fait couronner par la Victoire[6]. Enfin, ils participent aux côtés de l'empereur aux festivités données à l'occasion de ses trente ans de règne, ses tricennalia de 336[10], qu'il célèbre dans sa toute nouvelle capitale, Constantinople, fondée douze ans auparavant en 324.

Dès 335, il semble que l'empereur ait finalisé les modalités de sa succession[11]. Une répartition des différents diocèses de l'Empire est progressivement mise en place qui attribue une portion du territoire à chacun des successeurs désignés. Constantin II est chargé des diocèses de Bretagne, des Gaules, de l'Hispanie et de Vienne, Constance II reçoit l'Asie, le Pont et l'Orient, tandis que l'Italie, l'Afrique et la Pannonie sont mises au bénéfice de Constant Ier. Dalmatius n'est pas en reste puisqu'il reçoit la Mésie et la Thrace. Un cinquième homme est associée à cette distribution, il s'agit de Flavius Hannibalianus, frère de Flavius Dalmatius et cousin de Constance II, qui doit recevoir le royaume d'Arménie dont il est d'ores et déjà nommé roi des rois[Note 2] en sus de territoires dans la région du Pont, une fois que Constantin aura mené sa grande campagne contre les Sassanides[11]. Ce système à cinq est pérennisé par des mariages entre les différentes branches de la famille. Hannibalianus se marie ainsi avec sa cousine Constantina, la fille aînée de l'empereur, tandis que Constance II reçoit pour épouse Constantia, qui est également sa cousine, puisqu'elle est la fille de Flavius Julius Constantius, frère de Constantin Ier[11].

Les intentions réelles de Constantin Ier ne sont toutefois pas aussi évidentes. Pour avoir participé aux guerres civiles ayant consacré l'échec de la Tétrarchie, l'empereur vieillissant sait certainement combien ce système à cinq co-empereurs peut être fragile. Sans doute envisage-t-il de choisir, parmi ces Césars, celui qu'il estime être le plus compétent pour en faire son successeur, après les avoir mis à l'épreuve du pouvoir[4]. Peut-être a-t-il plutôt l'intention d'élever ses deux aînés, Constantin II et Constance II à l'Augustat, laissant Constant, Dalmatius et Hannibalianus au rang subalterne de César[11]. Toujours est-il que Constantin II, fort de son statut de fils aîné de l'empereur semble avoir joui d'une certaine prééminence sur ses frères et cousins[4]. Par ailleurs, le fait que les cinq héritiers présumés soient envoyés à la tête des différentes provinces ne signifie en aucun cas que le pouvoir à la fin du règne de Constantin Ier ait été partagé. L'empereur garde la haute main sur son Empire et ses Césars ne demeurent que des exécutants sans réel pouvoir d'initiative[12].

Qu'il ait ou non arrêté une décision précise sur l'organisation de sa succession, l'empereur Constantin Ier ne la précise pas clairement. Alors qu'il rend son dernier souffle à Ancyre, le [13], jour de la Pentecôte, à midi, après avoir reçu le baptême chrétien des mains de l'évêque arien Eusèbe de Nicomédie, il laisse un Empire avec quatre Césars et un roi des rois sans aucune instruction quant à la marche à suivre[14]. Pendant un mois, la foule des dignitaires et des simples citoyens défile dans le Grand Palais et se recueille devant la dépouille de l'empereur défunt, ramené entre-temps à Constantinople. Dans le même temps, des officiers sont envoyés aux quatre coins de l'Empire pour prévenir les Césars et le roi des rois de la vacance du pouvoir[15]. Chacun étant déjà installé dans sa zone d'influence, Constantin II à Trèves, Constant Ier à Milan, Dalmatius en Illyrie et Constance II à Antioche, c'est ce dernier qui est le plus proche de Constantinople et qui arrive le premier dans la capitale[16]. C'est donc lui qui prend en charge la conduite des obsèques, dès juin 337[15], il a alors vingt ans, et qui conduit la procession funèbre escortant le défunt à son mausolée en l'église des Saints-Apôtres où il est inhumé[17]. L'empereur reçoit l'apothéose du Sénat de Rome, tandis que des pièces de consecratio sont émises, au nom de Constance II et Constantin II, montrant le défunt debout sur un quadrige et accueilli par la main du Dieu des chrétiens[13]. L'influence de Constantin Ier survit à son décès puisque pendant trois mois, jusqu'en septembre 337, l'Empire reste sans Auguste en titre, aucun des Césars ne réclamant le titre[16].

L'Empire collégial

Les trois frères de sang

Cette situation de statu quo où aucun des quatre Césars et du roi des rois n'ose déclarer ses prétentions au titre impérial ne peut néanmoins pas durer éternellement. L'enchaînement précis des événements durant ces quelques mois n'est pas clair. Toujours est-il qu'il semble que l'armée ait refusé sa confiance aux deux neveux du défunt Constantin Ier[18], tandis que l'évêque Eusèbe de Nicomédie annonce, fort opportunément, avoir découvert un billet de la main du défunt accusant ses frères de l'avoir empoisonné[19]. Les trois frères encouragent alors des soldats de la garde impériale à massacrer les frères et neveux de l'empereur ou tout au moins les laissent agir de la sorte[18]. Le César Flavius Dalmatius, le roi des rois Flavius Hannibalianus, leur père le censeur Flavius Dalmatius et leur oncle Flavius Julius Constantius tombent, entre autres, assassinés. Quelques hauts fonctionnaires impériaux, à l'image du préfet du prétoire Ablabios, connaissent le même sort. De la famille proche de Constantin Ier, et à l'exception des trois frères, ne restent que deux survivants mâles, les enfants de Flavius Julius Constantius, soit les cousins des trois Césars, Constantius Gallus et Julien, âgés respectivement de onze et six ans[Note 3]. Le nom de Constance II est associé à ces événements, puisque, à la différence de ses frères, le César était présent à Constantinople et s'empresse de prendre des mesures conservatoires afin de confisquer les biens des victimes de l'épuration[18]. Qu'il s'agisse d'une sédition militaire que les trois Césars n'ont fait qu'encourager, ou d'un massacre bel et bien ordonné par eux[Note 4], le résultat est le même puisque les trois frères se sont libérés de tous ceux de leurs parents qui auraient pu avoir des prétentions sur le trône impérial.

Chapour II est roi des rois de l'Empire sassanide de 309 à 379. Il mène deux guerres contre Rome, de 337 à 350, puis de 358 à 363, sous les règnes successifs de Constance II et de Julien, qui se soldent finalement par une victoire sassanide.

Ainsi, à l'issue du massacre qui a vu mourir leurs rivaux, Constantin II, Constance II et Constant Ier se réunissent à Viminacium en Mésie, le , pour organiser le partage de l'Empire[Note 5]. Constance II, qui y est présent depuis juillet y accueille ses deux frères, et tous trois sont acclamés Augustes par les troupes de l'armée du Danube avec lesquelles Constance II vient de mener une brève mais victorieuse expédition contre les Sarmates. Les trois frères se partagent un trône laissé vacant durant plus de cent jours, période pendant laquelle, faute d'empereur en titre, toutes les décisions étaient encore prises au nom du défunt Constantin Ier. Si tous trois s'accordent sur la nécessité de sauvegarder l'unité de l'Empire[20], les modalités pour y parvenir sont âprement négociées lors de cette entrevue. Déjà, les territoires des neveux assassinés sont partagés entre les trois Augustes. Le diocèse de Thrace ainsi que, semble-t-il, une partie de celui de Mésie passent à Constance II et accroissent ses possessions orientales. Le reste du diocèse de Mésie est joint à la part du jeune Constant Ier[21]. Constantin II, l'aîné de la fratrie, exige un statut privilégié par rapport à ses frères, qui lui seraient d'une manière ou d'une autre subordonnés. Constant Ier et Constance II se prononcent, sans surprise, en faveur d'une direction collégiale de l'Empire. Un accord est finalement trouvé entre Constantin II et Constance II aux dépens de leur cadet : Constance II obtient de pouvoir légiférer comme il l'entend dans ses territoires et, en échange, Constantin II obtient de mettre Constant Ier, qui est encore mineur, ainsi que ses territoires sous sa tutelle[21].

Une fois le partage terminé, celui qui est désormais connu sous le titre de Constance II ne s'attarde pas en Mésie. Profitant de la mort de Constantin Ier, le roi des rois sassanide Chapour II a déclaré la guerre à Rome et la présence de l'empereur est requise sur le front oriental. L'objectif des Sassanides, qui attaquent le nord de la Mésopotamie, est la capture de la ville fortifiée de Nisibe dont la perte rendrait dangereuse toute expédition romaine en Arménie ou sur le territoire sassanide même[22]. Depuis Antioche, Constance II dirige les armées romaines mais s'appuie plus sur la force des forteresses orientales comme Nisibe, dont il fait lever le siège[Note 6], ou encore Singara et Amida pour briser l'élan offensif sassanide que sur des affrontements rangés[22]. De fait, si les Sassanides ne parviennent pas à s'imposer dans la région, la stratégie défensive de Constance II ne lui permet pas non plus d'obtenir de victoire claire et la guerre s'éternise, mobilisant toute l'attention de l'empereur alors que des troubles croissants agitent l'Occident.

La dyarchie

Le jeune Constant Ier, âgé de dix-sept ans lors de la conférence de Viminacium, n'est pas particulièrement satisfait des décisions qui y ont été prises. Très vite les relations s'enveniment entre Constant Ier et Constantin II, qui exerce un droit de tutelle sur l'administration de ses territoires, peut-être avec l'encouragement de leur cour respective[21]. L'envoi de troupes du Rhin à travers l'Italie de Constant, au motif d'aider Constance II dans son effort de guerre contre les Sassanides, sert de prétexte à la guerre. Au printemps 340, Constant détache des troupes pour stopper l'avance de son frère[21]. L'armée de Constantin II est rattrapée en Italie du Nord et les troupes de son cadet la font tomber dans une embuscade non loin d'Aquilée. Constantin II, qui commande personnellement l'armée, ne ressort pas vivant de ce guet-apens[23]. Toutes les provinces sous son autorité sont aussitôt saisies par Constant Ier, sans que Constance II, toujours occupé par ses campagnes en Mésopotamie, en tire le moindre avantage territorial[23]. Désormais pleinement satisfait du nouvel ordre des choses, et sans doute préoccupé par les incursions barbares sur le Rhin et le Danube, Constant ne déclare pas la guerre au dernier de ses frères. Une dyarchie s'instaure, l'Occident aux mains de Constant Ier, l'Orient à celles de Constance II, mais sans que soit sacrifiée l'unité du monde romain, l'unanimitas entre les deux frères, qui légifèrent conjointement[24]. Il semble qu'une nouvelle entrevue se soit tenue à Viminacium, le , entre les deux Augustes, à l'occasion de laquelle est justement réaffirmée l'unité de l'Empire[24].

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Solidus de Constance II, frappé à Antioche.

L'unité affichée de Constance et Constant se fissure quelque peu, dans la première moitié des années 340, au sujet de la politique religieuse à mettre en œuvre. La cause en est une position différente vis-à-vis de la question de l'arianisme qui divise profondément les communautés chrétiennes depuis le début du IVe siècle. En simplifiant à l'extrême la grande diversité des positions, on distingue en effet les ariens, du nom du prêtre Arius, qui considèrent Dieu et le Christ comme de substance différente voire au mieux semblable, le Fils étant créé et engendré par le père, et les nicéens, fidèles à la position issue du concile de Nicée de 325, qui considèrent le Fils comme engendré mais non créé et consubstantiel au Père. Constantin II, après avoir porté le credo nicéen à la suite du premier concile de Nicée, semble s'être découvert des sympathies pro-ariennes à la fin de son règne, sous l'influence d'Eusèbe de Nicomédie. Constance II semble s'être lui aussi montré favorable à cette vision mais son jeune frère Constant Ier s'y montre radicalement hostile[25]. Des troubles éclatent à Antioche et à Constantinople[Note 7], pour le contrôle du siège épiscopal, tandis que le très nicéen Athanase d'Alexandrie, chassé de son évêché par Constance II en 339, est réhabilité par les prélats occidentaux. Deux conciles se tiennent, à Sardique réunissant les Occidentaux, qui comme Constant sont majoritairement nicéen, et à Nicopolis où dominent les ariens, encouragés par Constance[25]. Moins déterminé sur la question, ou peut-être simplement trop occupé par ses campagnes orientales pour envisager la rupture avec Constant, Constance finit par céder et, en 346, Athanase revient triomphalement à Alexandrie. À partir de cette date, les relations semblent revenir au beau fixe, et des monnaies émises entre 348 et 350 célèbrent ainsi le « Retour des Temps Heureux »[26].

Entre-temps, les deux frères défendent chacun de leur côté les frontières romaines contre les envahisseurs barbares. Ainsi, tandis que Constant affronte les Francs sur le Rhin, qu'il défait par exemple en 342, puis les Sarmates et les Vandales sur le Danube, Constance poursuit sa guerre d'usure contre les Sassanides dans le nord de la Mésopotamie. Il remporte une victoire à l'été 343 puis une seconde aux abords de Singara, qu'il reprend peut-être à cette occasion, à l'été 344. Il se rend ensuite personnellement à Nisibe puis Édesse en 345 et affronte une troisième fois, en 348 les armées sassanides devant Singara où les deux camps subissent de lourdes pertes[27]. Il séjourne à Singara l'année suivante ainsi qu'à Émèse et dégage encore l'imprenable Nisibe du siège auquel la soumet le roi des rois durant l'été 350[Note 8]. À cette date, à l'issue de treize années de guerre, et en dépit de multiples offensives, les Sassanides ne sont toujours pas parvenus à submerger durablement les grandes forteresses frontalières de l'Empire romain[27]. Attaqué par les tribus nomades kidarites sur sa frontière orientale, Chapour II renonce temporairement à ses grands projets[28], tandis que les affaires d'Occident éloignent une nouvelle fois Constance II du soleil de l'Orient.

Le temps des séditions

Magnence commande la garde impériale et l'armée des Gaules sous Constant Ier. Il usurpe le pouvoir en 350, tue son souverain et affronte Constance II. Vaincu à Mursa, il se suicide en 353 laissant Constance II unique maître du monde romain.

En effet, son frère Constant Ier est tombé, renversé entre-temps par un nouveau coup d'État militaire. Impopulaire au sein des troupes du Rhin, celles qu'avaient commandé le défunt Constantin II[29], brutal envers les païens et ceux qu'il considérait comme des hérétiques, Constant semble s'être aliéné à la fois son état-major et la population des diocèses occidentaux[23]. Une conspiration se fomente, impliquant l'ancien préfet du prétoire des Gaules Fabius Titianus[23] et le comes rerum privatum Marcellinus, qui gère la fortune privée de l'empereur, au profit du comte Magnence, officier supérieur d'une armée, le comitatensis des Gaules[29],[Note 9]. Le , à la fin d'un banquet donné en l'honneur de l'anniversaire du fils de Marcellinus, Magnence revêt la pourpre impériale et se fait acclamer par les troupes. Constant, parti chasser aux environs d'Autun mesure tout de suite le rapport de force en sa nette défaveur et prend la fuite en direction des provinces hispaniques[30]. Rattrapé par Gaiso, officier de Magnence, à Castrum Helenae sur les marches des Pyrénées gauloises, il est mis aux arrêts et exécuté[29]. Profitant de la mort de Constant Ier, un de ses cousins, Népotien, survivant du massacre familial de 337, saisit lui aussi la pourpre, aux environs du mois de juin, en Italie. Il défait le préfet du prétoire de Magnence, Anicetus, mais est vaincu à son tour par Marcellinus et meurt sous les murs de Rome. L'Italie se rallie à l'usurpateur.

Libéré de ses guerres persiques à l'été 350, Constance II s'inquiète de la possibilité que les armées du Danube se rallient à leur tour à Magnence le mettant en position de force. Or, ce dernier a justement élevé son frère Magnus Decentius au césarat et lui a confié la frontière rhénane, le laissant libre de se consacrer à une possible guerre civile. Par l'intermédiaire de sa sœur Constance, veuve d'Hannibalianus, l'éphémère roi des rois romain d'Arménie, Constance II encourage un autre officier à usurper la pourpre. Il s'agit de Vétranion, commandant des troupes stationnées en Illyrie, qui se fait proclamer César par les soldats du Danube[31]. À défaut d'avoir pu s'en rendre maître à temps, Constance II ralentit tout au moins la progression de Magnence en direction de l'Orient. Ce dernier tente bien de se concilier Vétranion, tout en négociant avec Constance II sa reconnaissance comme Auguste d'Occident[31], mais échoue dans les deux cas. Constance II fait route vers l'Illyrie et la ville de Naissus, où il s'entretient avec Vétranion qui semble émettre désormais des prétentions sur le titre d'Auguste, qui ferait de lui l'égal de Constance II. L'empereur lui propose alors de s'en remettre à l'arbitrage de ces mêmes armées du Danube que commande Vétranion. Ce dernier accepte donc mais Constance II, dans un discours éloquent, en appelle aux mânes du défunt Constantin Ier, son père, et aux serments jurés liant les glorieuses armées danubiennes à la dynastie régnante[32]. Sentant ses troupes abandonner son parti, Vétranion se jette au pied de l'empereur et troque la pourpre contre une grâce impériale[Note 10].

En dépit de ce succès, au début de l'année 351, Magnence contrôle tout l'Occident, y compris l'Italie, l'Afrique[33] et peut-être même la Cyrénaïque[32] qui rallient son camp. Il est à Rome en février, où il nomme de nouveaux préfets du prétoire et de nouveaux préfets de Rome, et prépare sa campagne contre Constance II. Il repousse une tentative d'incursion de ce dernier en Italie du Nord, non loin d'Aquilée et pénètre en Pannonie[34]. Les deux forces se rencontrent à Atrans, Siscia et Sirmium sans qu'aucun des belligérants ne l'emporte de manière décisive. Finalement, les deux armées se mettent en ordre de bataille le , à Mursa. Aidé par la trahison du tribun Flavius Silvanus qui rallie ses rangs, Constance II semble l'emporter, encore que la bataille soit un bain de sang des deux côtés[Note 11]. Constance suscite par ailleurs sur les arrières de Magnence l'attaque du roi alaman Chnodomar qu'il pousse à envahir la Gaule. Magnence reflue sur Aquilée sans doute pour se replier en Hispanie mais Constance lève une flotte et débarque des troupes à Narbonne pour lui barrer la route[32]. En 352, il obtient le ralliement de l'Italie et de l'Afrique[33] et, en 353, il affronte une nouvelle fois Magnence au Mons Seleucus, non loin de Gap. À la suite de la victoire de Constance II, Magnence réfugié à Lugdunum met fin à ses jours, le , tandis que son frère et vice-empereur Magnus Decentius se pend à Sens[32]. Constance II, qui célèbre le trentième anniversaire de son accession au trône à Arles, ordonne une épuration des partisans du vaincu[35]. Même s'il se sait plus vulnérable que jamais[Note 12], et même s'il est désormais confronté aux incursions des barbares qu'il a poussé à envahir la Gaule, Constance II s'impose dès lors comme le maître unique de l'Empire romain.

L'Empire centralisé

Constantius Gallus et l'Empire sassanide

Si Constance II a pu s'éloigner si longtemps de l'Orient sans crainte, c'est qu'il a pris soin de s'y faire représenter. La cessation toute temporaire des hostilités peut en effet reconduire les deux Empires frontaliers à la guerre, pour peu que Chapour II finisse de régler ses propres soucis orientaux. Il fallut donc pour Constance II envisager de déléguer, fût-ce nominalement, la frontière sassanide à un haut-responsable romain. Très attaché à l'impératif dynastique, et rendu méfiant contre ses généraux au vu des événements en Occident, Constance prend le parti de nommer un membre de sa famille au rang de César[36]. Or, quatorze ans après le massacre familial, le choix s'offrant à l'empereur n'est pas très large, puisque de sa parenté proche ne restent que deux survivants, ses cousins Constantius Gallus et Julien, tous deux fils de Flavius Julius Constantius. À la différence de leur père, ils avaient, en effet, eu la chance de survivre à cette nuit terrible, mais ils avaient été envoyés par Constance II, pour plus de sûreté, en résidence surveillée à Macellum en Cappadoce[37]. Le choix de l'empereur, renseigné par ses agents, se porte sur Gallus, le plus vieux des deux frères, qui, du haut de ses vingt-cinq ans, est subitement invité à quitter sa réclusion pour se rendre à la cour rejoindre son cousin. Le , à Sirmium, en pleine guerre civile contre Magnence, Constance II revêt son cousin du manteau de pourpre des Césars et lui offre, de surcroît, la main de sa sœur, Constance, qui l'a habilement servi durant l'usurpation de Vétranion[38].

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Constantius Gallus est l'un des rares survivants, avec son frère Julien, du massacre de 337. Sorti de réclusion pour être nommé César par Constance II, il tient les Sassanides en respect en Orient mais s'y conduit en tyran. Convoqué par Constance II, il est jugé de manière expéditive et exécuté, à l'hiver 354.

Le nouveau César ne porte sans doute pas l'empereur dans son cœur, le croyant certainement impliqué dans l'assassinat de son père et du reste des Constantiniens[36]. Il semble d'ailleurs que lors de leur entrevue, l'empereur ait amorcé devant lui le début d'un repentir, attribuant à ses propres péchés son incapacité à avoir un héritier ou ses contre-performances dans sa guerre contre les Sassanides[38]. Gallus, qui rejoint Antioche en mai 351, ne se fait toutefois pas d'illusion sur la nature de leur relation. Dans une lettre qu'il lui adresse, Constance II prend en effet le soin de lui rappeler que « le pouvoir ne peut ni ne doit être partagé »[39],[Note 13]. De fait, les prérogatives du César sont minimes : il n'exerce qu'une fonction de représentation du pouvoir impérial. Ses officiers supérieurs comme Ursicin et ses fonctionnaires impériaux comme le préfet du prétoire d'Orient Thalassios ne reçoivent leurs ordres dans les faits que de Constance II et c'est à lui qu'ils adressent leurs rapports[35]. Cet état de fait agace le César autant que sa femme, qui, sûre du soutien de Constance II après le rôle qui fut le sien durant la guerre civile, encourage Gallus à se saisir réellement du pouvoir dont il est, en principe, le titulaire[40]. Prenant la tête de ses troupes, le César remporte quelques succès, contre les Isauriens en Cilicie[40], contre des Juifs révoltés en Galilée à l'été 352, il semble abattre la conspiration d'un certain Orphitus, un ancien proche de Magnence, et surtout il tient en respect l'éternel ennemi sassanide[35].

Mais, encouragé par sa femme[Note 14], il semble se comporter en véritable tyran, exécutant, bannissant et confisquant de manière parfois quelque peu hâtive au point de s'attirer finalement une relative impopularité[41]. Plus grave aux yeux de Constance II, il aurait secrètement commencé à se constituer un parti sur place, laissant craindre à l'empereur, tout juste sorti de trois ans de guerre civile, une nouvelle usurpation[41]. Par mesure de précaution, Constance rappelle un maximum de troupes d'Orient, troupes dont il peut du reste avoir réellement besoin, tandis que lui-même traverse le Rhin au printemps 354 pour affronter les barbares. Dans le même temps, une émeute éclate à Antioche où réside Constantius Gallus, en réaction à la famine qui touche la ville. À la suite d'une réflexion semble-t-il maladroite de Gallus, la population se retourne contre le gouverneur de Syrie qui est massacré[36]. Gallus réagit violemment et réprime dans le sang. Constance, sans doute décidé à le relever de ses fonctions, lui envoie plusieurs lettres invitant le couple à se rendre à sa cour, lettres auxquels le César ne donne aucune suite[42]. Profitant de la mort du préfet du prétoire d'Orient Thalassios, Constance charge son successeur nouvellement nommé, Domitianus, de presser instamment Constantius Gallus de le rejoindre dès son arrivée à Antioche. Peut-être lancé dans une fuite en avant, après avoir deviné les intentions de son supérieur[42], ou commettant simplement une irréparable erreur, Gallus fait arrêter et exécuter ce préfet à son arrivée, ainsi que le questeur du palais[36]. Constance convoque une nouvelle fois son César à Milan, qui cette fois ne peut plus tergiverser. Privé de sa femme, Constance, la sœur de l'empereur, qui meurt de maladie sur le chemin, et après une étape à Constantinople, où il prend encore le temps d'assister à des jeux, Constantius Gallus est conduit à Poetovio, au sud de Vienne, en septembre 354, où il est dépouillé des insignes impériaux, puis à Pula où un tribunal spécial dirigé par l'eunuque Eusébios le condamne à mort[43].

La Gaule et Julien

Constance II se débarrasse ainsi d'un vice-empereur brutal et impopulaire mais est de nouveau confronté au problème qui était le sien durant la guerre civile : concilier la défense et la réorganisation des Gaules soumises aux invasions, tout en maintenant en respect le voisin sassanide toujours suspect d'être tenté, au moindre signe de faiblesse, de relancer les hostilités. Hésitant à renouveler l'expérience malheureuse de Gallus, il s'efforce, dans un premier temps, de gérer seul l'immensité de l'Empire. Il mène en Gaule plusieurs campagnes, contre les Alamans du Brisgau à la fin de l'année 354, puis en 355 contre ceux du Bodensee[44]. Alors qu'il retourne à Milan où réside sa cour, l'empereur confie au général Silvanus, qui avait opportunément trahi Magnence à la veille de la bataille de Mursa, la défense des Gaules avec rang de magister peditum[45], voire de magister militum, l'un des grades les plus élevés de la hiérarchie militaire du Bas-Empire romain[46]. La rapide promotion du nouveau maître de l'infanterie attise cependant la rivalité d'un autre officier général de Constance II, le maître de cavalerie Arbetio, qui, avec l'aide de plusieurs hauts-fonctionnaires civils comme le préfet du prétoire des Gaules Lampadius, monte un complot pour le faire chuter[Note 15]. Des lettres falsifiées sont présentées à l'empereur, à Milan, qui semblent indiquer que Flavius Silvanus fomente un complot pour le renverser. Plusieurs officiers présents à la cour, à l'image du tribun des scholes palatines Mallobaud, se récrient, prennent la défense du malheureux général et obtiennent finalement la tenue d'une enquête[45]. Bien leur en prend puisque les faussaires sont finalement confondus et mis hors d'état de nuire. Cependant, mal informé, craignant d'être de toute façon condamné à mort, Flavius Silvanus se lance dans une fuite en avant et se fait acclamer empereur à Colonia Claudia Ara Agrippinensium (Cologne)[47], le . En réaction à cet acte hostile, Constance II envoie une petite délégation, commandée par le général Ursicin, officiellement pour rendre hommage à l'Auguste autoproclamé. Arrivé sur place, au mois de septembre 355, Ursicin soudoie quelques hommes de Silvain, des Brachiales et des Carnutes, et leur fait assassiner leur chef alors qu'il se rend à la messe[48].

Constance se débarrasse ainsi de son cinquième usurpateur, mais il perd dans ces événements plusieurs officiers généraux compétents, à commencer par Silvanus, alors que les barbares Francs, Alamans, Saxons, s'assurent le contrôle des quarante places fortes romaines sur le Rhin, ouvrant le territoire à leurs incursions[49]. La pression des Quades et des Sarmates sur le Danube, la menace sassanide en Orient, l'absence de généraux brillants et de jeune héritier[Note 16] poussent Constance II à considérer à nouveau la possibilité de nommer un César parmi sa parenté. Sans surprise, c'est sur Julien, son cousin, le dernier des Flaviens descendant de Constance Chlore, que se porte son choix. Là encore, Constance II peut craindre, à raison, de n'être pas particulièrement apprécié par son cousin, de par son implication dans la mort de son père Flavius Julius Constantius mais aussi de son frère Constantius Gallus. Pressé par l'urgence de la situation en Gaule, et conseillé dans ce sens par son épouse Eusébie[Note 17], Constance II, se résout finalement, encore qu'avec répugnance, à draper Julien de la pourpre des Césars, à Milan, le , et à lui accorder la main de sa sœur cadette Hélène[50].

Encore une fois, si Julien reçoit une juridiction étendue à la Gaule, à l'Hispanie et à la Bretagne, les décisions de l'état-major et les comptes de l'expédition sont tenus à Milan par Constance II, le César n'étant réduit, comme Gallus avant lui, qu'à une fonction d'apparitor aux ordres du Prince[36]. Cette fois encore, Julien est entouré d'hommes de confiance de Constance II, à l'image des généraux Marcellus et Barbatio, du préfet du prétoire de la Gaule Flavius Florentius ou du questeur Secundus Salutius avec lequel cependant il finit par se lier. Du reste, le nouveau César n'a reçu aucune formation militaire, et lors de ses passages à Nicomédie et Athènes après avoir quitté sa réclusion de Macellum, il passe plus de temps en la compagnie des philosophes qu'au milieu des casernes, ce qui laisse peu d'illusions à Constance II sur ses qualités potentielles de stratège[51]. Ainsi, Constance ne daigne le faire informer de la situation réelle en Gaule, notamment la perte de la ville de Cologne, qu'à son arrivée à Turin, plusieurs jours après son départ de Milan, le , escorté sur quelques milles par son cousin[52]. De toute évidence, Julien ne dispose que de peu d'opportunités de briller dans ses campagnes, entouré de généraux qui le surveillent plus qu'ils ne lui obéissent, au milieu d'un pays ravagé par les barbares et affaibli par les guerres.

Une affaire de famille

En plusieurs années de guerre, Julien finit par repousser les barbares hors des Gaules en les défaisant notamment à la bataille d'Argentoratum de 357. Inquiet de ces succès, Constance II appelle en Orient les meilleurs bataillons de son césar et provoque ainsi l'usurpation tant redoutée.

Le jeune César les surprend rapidement. Convaincu d'être investi d'une mission, rêvant d'être habité du genius du peuple romain, cet intellectuel féru de récits homériques entend faire revivre la gloire de ses ancêtres, réels comme Constance Chlore ou supposés comme Claude II le Gothique, qui avaient repoussé le péril barbare hors des frontières de l'Empire[53]. Hivernant à Vienne près de Lugdunum, il tire profit de son immobilité pour recevoir une formation militaire sommaire de la part du questeur Secundus Salutius[54]. Quittant la cité au printemps 356 pour rejoindre l'armée à Reims, selon les ordres de Constance, il fait un détour par Autun, qui avait manqué de tomber l'année précédente, et où avait séjourné son grand-père Constance Chlore. Arrivé en Gaule belgique en juin, il y est mis au courant du plan préparé depuis Milan par Constance II et son état-major. La région rhénane est ratissée par deux armées romaines, l'une sous les ordres de Marcellus et Ursicin, l'autre sous l'autorité, encore toute théorique, de Julien, et la principale ville de la région, Cologne, est reprise au mois d'août[55]. Julien se retire à Trèves puis à Sens où on l'envoie passer l'hiver. Dans le même temps, confronté à une nouvelle poussée barbare que les premiers succès romains n'ont pas découragé Marcellus est contraint de faire dégarnir Sens dès l'hiver 356. Ayant été mis au courant que le césar Julien y passe l'hiver avec une garde restreinte, une armée alamane pousse jusqu'à la résidence impériale et met la ville au siège. Au printemps, lassés de la résistance de la ville fortifiée, les Alamans finissent par lever le siège. Marcellus, présent à proximité et qui n'a rien fait pour libérer un supérieur en titre qu'il n'apprécie guère, est alors convoqué par Constance II à Milan pour répondre de son comportement[56]. Si l'Auguste n'est, lui non plus, pas vraiment désireux de voir Julien s'illustrer à la guerre, il n'apprécie que très peu la faible considération que son général semble avoir pour la pourpre impériale, fût-ce celle d'un simple César. Marcellus est limogé, Ursicin envoyé en Orient et Constance II, toujours encouragé par son épouse Eusébie, se résout à confier à Julien le commandement effectif sur l'armée et l'administration de la Gaule romaine au printemps 357.

Si Constance II se décide à laisser à Julien les rênes de la Gaule, il ne renonce pas à le surveiller à distance. Ainsi, un nouveau général vient rejoindre l'état-major du César, Barbatio, ancien commandant des gardes de Constantius Gallus, qui avait dégradé et transféré celui-ci à son tribunal de Pula. Après avoir maté une révolte de supplétifs germains en Franche-Comté, Julien reprend l'offensive selon les plans de 356, il se porte sur Saverne qu'il consolide tandis que Barbatio doit le rejoindre en longeant la rive gauche du Rhin. Mais, retardé par une traversée du Rhin improvisée, Barbatio prend la décision de faire demi-tour et de ramener son armée hiverner dans ses cantonnements initiaux[57]. Attendant des renforts qui ont fait volte-face, Julien et son corps d'armée sont confrontés à une concentration importante de barbares, déjà avertis du repli de Barbatio. Refusant de se rendre, le César marche contre eux en direction de Strasbourg où il leur livre bataille à Argentoratum bien qu'en infériorité numérique. Il remporte cependant la victoire et le roi des Alamans Chnodomar est fait prisonnier et envoyé à Constance II. Après avoir encore mené quelques incursions outre-Rhin et dans l'arrière-pays gaulois, le César Julien, grandi de ses nouveaux lauriers, se rend à Lutèce au printemps 358, avant de repartir en campagne à l'été. En 358 et 359, il réduit les Francs saliens dans le Brabant, les Chamaves au-delà de la Meuse, répare les grandes forteresses rhénanes aux frais des barbares et finalement lève une flotte chargée de protéger les convois de ravitaillement à destination de la Gaule et en provenance de la Bretagne[58].

S'il se réjouit de trouver la Gaule en bon ordre, Constance II regarde avec défiance les succès de son vice-empereur. Fort du souvenir des premiers usurpateurs, il peut être en droit d'en craindre une redite, de la part d'un cousin dont il se sait mal-aimé et qui dispose à la fois d'appuis dans les milieux intellectuels orientaux, où il frayait avant son César, mais aussi au sein des armées du Rhin désormais liées à sa cause. L'empereur doit, dans le même temps, quitter les régions danubiennes, où il vient de soumettre de manière décisive les Quades et les Sarmates[59], pour se porter en hâte vers Constantinople et l'Orient alors que Chapour II, reprenant les hostilités, franchit le Tigre en 358. Évitant Nisibe cette fois, le roi des rois met le siège sous les murs d'Amida qui tombe en octobre 359[60], laissant six légions prisonnières des Sassanides. Résolu de régler ses deux problèmes à la fois, Constance ordonne à l'état-major de Julien de lui envoyer ses meilleurs bataillons, notamment les auxiliaires hérules et bataves qui s'étaient illustrés pendant les campagnes rhénanes, qui seraient autant de moins en cas d'usurpation tout en se montrant des plus utiles dans ses guerres persiques[61]. L'envoyé de Constance II, Decentius, arrive en janvier 360 à Lutèce porteur d'une nouvelle qui n'enchante que très modérément les troupes en partie gauloises et germaines, très attachées semble-t-il à leur nouveau César et peu désireuses d'abandonner leurs familles pour aller combattre dans la lointaine Mésopotamie au climat si différent du leur[61]. Sorti de son palais en pleine nuit, ceint du diadème de circonstance et levé sur un bouclier à la manière franque, le César Julien est acclamé Auguste par ses troupes en février 360[62]. De nouveau, Constance II prend les armes pour défendre son trône.

La défaite de l'invaincu

Soucieux avant tout de gagner du temps, voire de se faire reconnaître par Constance II, Julien l'usurpateur lui envoie aussitôt une longue lettre le conjurant de croire qu'il n'a fait que céder à la violence des armes, pour éviter qu'un autre moins bien intentionné ne commande à la révolte. Averti en mars 360 de la rébellion de son cousin, Constance II reçoit peu après, à Césarée de Cappadoce, deux envoyés porteurs de ladite lettre, signée Julien César, dans laquelle l'usurpateur entend négocier le maintien de son titre augustal[63]. Constance II rejette avec fureur ces propositions, conscient que le rapport de force joue en sa faveur. Des différents diocèses, seuls ceux de Gaules et de Bretagne, après que Julien a mis aux arrêts le général Lupicinus de retour d'une campagne victorieuse, se sont déclarés ouvertement en sa faveur[64]. Constance II envoie deux émissaires successifs, un chargé de mission du nom de Léonas qui refuse les propositions de Julien, puis un évêque des Gaules, Épictète, qui le somme de se rendre pour avoir la vie sauve, sans succès. Après une nouvelle campagne sur le Rhin, Julien marche sur Vienne où il prend ses quartiers d'hiver à la fin de l'année 360.

Constance II doit quant à lui poursuivre sa guerre sassanide : durant l'hiver, il se porte sur Édesse puis Amida, assiège Bezabde et se rend à Hiérapolis. En 361, à la différence de Julien qui laisse les Gaules nettoyées des barbares, il est beaucoup plus difficile pour Constance II de quitter un front oriental de nouveau en grande difficulté. Envisageant peut-être d'appliquer à Julien la stratégie de créer une diversion sur le Rhin qui fut la sienne contre Magnence, l'empereur correspond avec le chef barbare Vadomaire jusqu'à ce que ce dernier soit capturé par les forces de l'usurpateur[65]. Il veille également à fortifier les riches provinces d'Afrique contre un potentiel débarquement venant d'Italie. Après un nouvel été à batailler sur l'Euphrate, et apprenant que Julien, à la tête de ses armées s'est mis en marche vers Sirmium en Illyrie, Constance II quitte finalement la Mésopotamie supérieure pour marcher au-devant des forces de son rival. En juillet, Sirmium tombe entre les mains de l'usurpateur qui avance jusque Naissus où il se prépare pour l'affrontement avec les armées de son cousin[66]. Constance II lui épargne cette peine. Tombé malade à Tarse en octobre, Constance II, épuisé par la fièvre, décède le , à Mopsueste en Cilicie, dans sa quarante-quatrième année, la vingt-quatrième de son règne[Note 18].

Julien Auguste abandonne la stratégie défensive de Constance II autour des forteresse de la Mésopotamie du nord telles qu'Amida, Singara ou Nisibe et lance une expédition en plein cœur du territoire sassanide qui se solde en 363 par la mort de l'empereur et la défaite de Rome.

Baptisé au dernier moment, comme l'avait été son père Constantin Ier avant lui[Note 19], Constance II désigne un successeur avant d'expirer. Renonçant à faire endurer aux populations de l'Empire les affres d'une nouvelle guerre civile, pleinement conscient de l'intérêt supérieur d'un Empire menacé de toute part, et résolument attaché à faire survivre la dynastie constantinienne, l'empereur fait de son ennemi et néanmoins cousin son héritier désigné[62]. Aux alentours du 20 novembre, Julien l'usurpateur apprend ainsi que son rival est mort et qu'il est désormais Auguste incontesté de tout le monde romain. Décrétant un deuil national, le nouvel empereur se rend à Constantinople où il accueille la dépouille impériale qu'il conduit, en grande pompe, en l'église des Saints-ApôtresConstance II va reposer aux côtés de son père. Présidant le Sénat de Constantinople, Julien rend finalement au défunt les honneurs de l'apothéose[67]. À ce nouvel Auguste, qui revendique enfin après des années de dissimulation son culte des anciens dieux romains, échoit un Empire où coexistent païens et chrétiens, eux-mêmes déchirés par les hérésies, arianisme et donatisme. Mais le principal héritage que Julien reçoit de son prédécesseur demeure le conflit sassanide. Cette guerre de vingt-six ans que Constance II n'est jamais parvenu à gagner va causer la perte de Julien. Auréolé de ses succès, ce dernier se lance, sur les traces d'Alexandre le Grand, dans une grande campagne au cœur du territoire ennemi. Cet abandon de la stratégie défensive de son prédécesseur ne se révèle finalement pas être le succès escompté, puisque le , après avoir renoncé à prendre la capitale sassanide, Ctésiphon, l'empereur Julien est mortellement blessé, en plein territoire sassanide, alors qu'il participe à un combat d'avant-garde. Jovien, son successeur désigné aura la rude tâche de signer une paix humiliante avec Chapour II mais aussi de rétablir l'Empire chrétien, qu'avaient défendu toute leur vie Constantin Ier et son fils.

Constance et l'héritage constantinien

Ancienne et Nouvelle Rome

Possible représentation de l’église des Saints-Apôtres, commencée sous Constantin Ier et achevée par son fils Constance II. Bien qu'il visite Rome et y célèbre son triomphe, son règne est surtout marqué par un déclassement relatif de la Ville éternelle vis-à-vis de Constantinople. Homélies de Jacques de Kokkinobaphos, vers 1150.

Lorsque Constance II accède au trône cela fait plus de cent ans que la cour impériale n'est plus dans Rome. En effet, les crises et invasions du IIIe siècle ont incité les empereurs à fuir Rome au profit de forteresses frontalières. Mais Constantin Ier, au sortir des guerres civiles, décide de créer une nouvelle cité vouée à devenir une résidence impériale à l'égale de Rome, mais plus proche des frontières stratégiques. En 324, le plan de Constantinople est consacré. Après un dernier séjour en Italie et plus précisément à Rome en 325 où il célèbre son triomphe sur Licinius, l'empereur quitte définitivement le Latium pour le Bosphore[68].

Constance César puis Auguste, d'abord à la tête de la pars orientalis n'a pas l'occasion d'honorer la Ville de sa présence. Ses guerres orientales et les séditions rhénanes le cantonnent par la suite plus proche des frontières, généralement à Antioche ou à Milan. Pour autant, l'Urbs demeure le lieu par excellence des cérémonies grandioses[69], aussi le Prince décide, en 357, profitant de la présence de Julien en Gaules et du calme provisoire sur la frontière syrienne, d'aller avec l'impératrice y célébrer son triomphe sur Magnence[70]. Sa visite, qui intervient trente-deux ans après celle de son père, commence le et dure un mois[71]. Le récit qu'en fait l'historien Ammien Marcellin dénote la pompe et la magnificence des cérémonies qu'il y donne. Personnellement impressionné par la majesté de la Ville[Note 20], Constance II donne à voir pendant toutes ces célébrations le profil hiératique[Note 21] renforcé du protocole imposant qu'affectionneront plus tard les empereurs byzantins[72]. Avant de quitter - définitivement - la Ville, il la pare d'un obélisque issu du grand temple de Karnak, que Constantin avait initialement destiné à sa Nouvelle Rome mais qui va finalement trôner sur la spina du Circus Maximus.

Pour autant, Constance II ne néglige pas sa nouvelle capitale, et sa visite à Rome tient en réalité plus d'une parenthèse inattendue pour ses habitants que d'un réel retour en gloire de ce majestueux « conservatoire des gloires passées » désormais orphelin de ses empereurs[69]. Installé à Constantinople même à partir de 359, Constance y consolide la position de sa nouvelle capitale. Ainsi, le proconsul de la ville devient préfet de Constantinople, égalant ainsi en dignité l'ancienne Rome qui jusqu'à présent était seule à avoir joui du privilège d'avoir un préfet de la ville, tandis que Thémistios élargit au nom de l'empereur de trois-cents à deux-mille la liste des membres sur l'album de ce Sénat de Constantinople qui avait été créé par Constantin sur le modèle du Sénat romain[73]. De même, il pare la cité de nouveaux monuments et achève ainsi l'église des Saints-Apôtres qui sert ensuite de nécropole impériale pour les empereurs orientaux. On lui doit surtout la construction de la première basilique Sainte-Sophie[Note 22], qui constitue alors la plus grande église de la cité, et qui est consacrée le [74]. Par les honneurs qu'elle reçoit et les splendeurs architecturales qui la parent progressivement, Constantinople se démarque des résidences impériales du IIIe siècle et se place, conformément aux souhaits de Constantin II, sur un pied d'égalité avec l'ancienne Rome qui subira alors un relatif déclassement vis-à-vis d'une rivale orientale en pleine ascension.

Administrations et positions de pouvoir

À son arrivée au pouvoir absolu, Constance II doit gérer la mise en œuvre des grandes réformes constantiniennes. Il hérite du système monétaire mis en place par son géniteur et basé sur le solidus d'or, et doit notamment combattre une certaine inflation tandis que l'accroissement des dépenses de prestige à la cour impériale et les guerres, civiles et extérieures, grèvent le budget de l'Empire[75]. Constance II s'efforce de rétablir l'équilibre, notamment via une politique d'émission monétaire : il fait frapper des monnaies plus lourdes en cuivre pur ou saucé, à l'image de la majorina ou du centenonialis, centième théorique du solidus. En 348, le monnayage unique de bronze est remplacé par trois monnaies, puis on revient à une seule durant le règne de Magnence, dont le poids diminue jusqu'à 2 g sous Julien César. Le miliarense d'argent diminue aussi après 353. Le revers monétaire dominant parmi les frappes, FEL TEMP REPARATIO, exprime la propagande impériale et célèbre le rétablissement des temps heureux[76]. Seul le solidus d'or est maintenu stable et son volume d'émission augmente avec l'exploitation de nouveaux gisements. Il concurrence de plus en plus l'argent dans les exigences fiscales et judiciaires de l'administration durant la période 350-360, et le supplante ultérieurement[77]. Toutefois, en dépit de ses soucis financiers, Constance II veille tout de même à faire restituer aux cités les revenus des anciens biens communaux qu'avaient confisqués son illustre prédécesseur[75]. La législation impériale est également marquée par la traditionnelle politique répressive des Césars[78] de sorte qu'il continue la politique moralisatrice de son père en imposant par exemple la séparation des sexes dans les prisons, en réprimant plus durement le rapt[75], ou en châtiant sévèrement les adultères, « sacrilèges de noces »[79], qui devaient être mis en sac avec quatre animaux - serpent, singe, coq, chien - et noyés[80].

Le règne de Constance II se caractérise également par un prolongement des réformes administratives de Dioclétien et Constantin Ier. C'est ainsi dans les années 340 qu'est réformée la préfecture du prétoire, sans doute à l'initiative de Constant Ier, sur un modèle qui est repris par Constance II après sa victoire de 353 sur Magnence[81]. Le préfet n'est ainsi plus un haut fonctionnaire civil vivant aux côtés de l'empereur et à la tête de l'administration centrale mais devient une autorité déconcentrée placée à la tête d'un regroupement de diocèses. Un nouvel échelon administratif se met donc en place, sous la forme d'un collège de quatre préfectures du prétoire, chacune dirigée par un préfet directement aux ordres de l'empereur : la préfecture des Gaules regroupant les diocèses de Bretagnes, de Gaules proprement dites, de Vienne et d'Hispanie, la préfecture d'Italie comprenant l'Italie elle-même mais aussi l'Afrique, la préfecture d'Illyrie autour de la Pannonie, de la Mésie et de la Thrace, et enfin la préfecture d'Orient à la tête des diocèses d'Orient, d'Asie et du Pont[81]. Cette division de l'Empire en préfectures, en diocèses et en provinces, qui se maintient jusqu'à la mise en place du système thématique vers le VIIIe siècle, consacre une hiérarchisation accrue des différents fonctionnaires impériaux. Préfet, vicaire - à la tête du diocèse - et gouverneur dans la hiérarchie civile, et leurs alter ego au sein de l'armée romaine tardive, maître des milices, comte et duc, constituent la principale ossature de cette nouvelle administration impériale[Note 23]. La distinction claire entre carrières civiles et militaires, qui disparaît quatre siècles plus tard à la suite des réformes thématiques d'Héraclius et de ses successeurs, est pour l'heure encore renforcée par Constance II qui s'efforce de protéger les fonctionnaires civils contre l'influence des militaires et qui définit des règles strictes régissant l'avancement dans les deux corps[75]. Il est également notable que Constance II favorise l'accession de quelques juristes aux plus hautes positions de l'État, à l'image du préfet du prétoire d'Illyrie Anatolius ou du comte d'Orient Modestus[82].

Pour autant, si le Prince accroît le poids de la bureaucratie, il encourage surtout la multiplication des organes de contrôle et d'espionnage centralisés au palais. L'empereur, d'un naturel méfiant exacerbé par les coups d'État successifs, se méfie de ses généraux et de ses hauts-fonctionnaires les fait surveiller. Notaires, eunuques et agentes in rebus, au cœur d'un des premiers système de renseignement réellement abouti[83], entourent l'empereur et composent son conseil restreint aux dépens des prélats et des fonctionnaires impériaux. L'eunuque de la chambre Eusébios[Note 24], ou encore le notaire Paul dit Catena, soit la Chaîne car il passait pour être un maître des interrogatoires, constituent ainsi l'entourage quasi exclusif du Prince. Du reste, même les Césars qu'il décide d'élever sont soumis à cette surveillance étendue : c'est Eusébios qui préside ainsi le tribunal condamnant à mort Constantius Gallus de retour d'Orient, tandis que Paul est envoyé aux côtés de Julien dans ses campagnes gauloises[Note 25]. Seule l'impératrice Eusébie, deuxième des trois épouses successives de Constance II, passe pour avoir eu une influence autonome sur un mari passablement épris. Les officiers supérieurs de l'empereur ont par voie de conséquence une influence assez restreinte sur leur maître. Du reste, Ammien Marcellin, qui est le principal chroniqueur de la période et qui sert lui-même comme officier dans les armées de Constance, les traite assez durement, assimilant ainsi les généraux Barbatio, Arbetio ou Marcellinus à des incapables ne devant leur poste qu'à leur courtisanerie[82],[Note 26]. Parce qu'il jette les bases administratives du futur Empire byzantin, parce qu'il fait de Constantinople une capitale impériale, par son goût pour le protocole, la majesté et le faste de la maison impériale, et par la place que prennent progressivement les eunuques à sa cour, Constance II est ainsi parfois considéré comme le premier des empereurs byzantins[84].

Le Prince et le Seigneur

L'Église dans l'Empire

C'est sans doute peu avant sa victoire au pont Milvius de 312 que l'empereur Constantin Ier se convertit à la religion du Christ. Averti peu avant l'affrontement dans un songe prophétique qu'il allait emporter la victoire, il fait peindre le chrisme sur son casque et sur les boucliers de son armée.

Ce sont cependant les problèmes religieux qui marquent le plus intensément le règne de Constance II. Premiers Princes à avoir reçu une éducation chrétienne[Note 27], Constantin II, Constance II et Constant Ier semblent promis à continuer l’œuvre de leur père, Constantin Ier, le premier empereur à avoir revendiqué sa croyance en le Christ, qui a tout au long de son règne favorisé la religion montante. Sans doute les trois enfants s'efforcent-ils d'imiter leur père puisqu'ils interviennent eux aussi, dès leur arrivée au pouvoir suprême, dans les affaires religieuses. Ainsi, ils poursuivent notamment le mouvement de lutte contre le paganisme simplement amorcé par leur prédécesseur. Sans doute sous l'influence de Constant, le plus radical des trois frères, une célèbre loi est prise par les empereurs en 341 qui interdit formellement « la démence que sont les sacrifices »[Note 28]. En 346, un nouvel édit de Constance II ordonne la fermeture des temples païens, en interdit l'accès et punit de mort les contrevenants dont les biens doivent être versés au trésor impérial[85]. En 353, les sacrifices nocturnes, déjà interdits par Constantin et qui avaient brièvement été autorisés de nouveau par Magnence sont de nouveau frappés d'interdit[86]. Une loi du 19 février 356[87] précise que ceux qui enfreignent cette règle et qui sacrifient tout de même aux dieux païens sont susceptibles d'être condamnés à mort[88]. Des lois contre la divination et la magie prévoient également de livrer au bourreau les coupables, fussent-ils de hauts fonctionnaires[89]. Enfin, des lois contre les Juifs viennent également compléter cette législation contre les ennemis de la vraie foi puisqu'il leur est ainsi interdit de posséder des esclaves d'un autre peuple en 339[90], tandis que les anciens chrétiens convertis au judaïsme doivent être spoliés de tous leurs biens au profit de l'État d'après un texte de 352[91].

Pour impressionnantes qu'elles soient, ces lois sont toutefois très diversement appliquées dans les différentes régions de l'Empire. Elles sont ainsi relativement modérées en Occident où elles ne sont guère que de simples déclarations de principe ne trouvant que quelques rares applications, et notamment en ItalieRome, dans son Sénat, demeure un « repaire de païens » notoire[92]. Du reste, Constance II, qui demeure comme c'était le cas pour son père Pontifex Maximus[Note 29], s'acquitte consciencieusement, lors de sa visite dans la Ville éternelle de ses devoirs de dirigeant des cultes traditionnels et distribue ainsi les différents sacerdoces aux aristocrates romains[93], même s'il profite de l'occasion pour retirer l'autel de la Victoire de la Curie Julia[Note 30]. En Orient, où les chrétiens sont bien plus nombreux, bien qu'encore loin d'être majoritaires[Note 31], les mesures sont en revanche bien mieux appliquées et l’avènement de Julien qui ordonne la restitution des différents éléments des temples abattus accroît des tensions déjà vives entre les communautés[94].

En parallèle de ces coups portés aux rites et pratiques païens, la fratrie privilégie l'Église au gré de ses décisions. En 343, le clergé et ses serviteurs sont exemptés d'impôt et reçoivent l'assurance qu'ils n'en subiront plus à l'avenir[95]. En 349, les membres du clergé appartenant à l'ordre décurional sont libérés de leurs munera, les coûteuses obligations municipales, de même que leurs enfants[Note 32] qui sont appelés à suivre leurs traces[96]. Ces deux exemptions sont réaffirmées en 356 où elles deviennent valables non seulement pour les membres du clergé mais aussi pour leur femme, leurs enfants et même leurs serviteurs[97]. En 355, Constance II autorise finalement les évêques ayant maille à partir avec la justice à être jugés par leurs pairs et non plus par les tribunaux impériaux[98]. Mise à part cette dernière mesure, Constance II, comme son père Constantin, ne garantit guère plus aux cadres de l'Église que ce que sont déjà les privilèges des prêtres païens[99] et c'est plus en revendiquant officiellement leur foi et en s'entourant de chrétiens convaincus que l'un et l'autre font dans un premier temps progresser leur Église[100]. En faisant du christianisme leur religion personnelle, Constantin et sa progéniture s'estiment ainsi fondés à libérer leur coreligionnaires de liturgies coûteuses impliquant des sacrifices et en arrivent à interdire, comme le fait Constance, à des païens de recourir à d'anciens soldats, et par la même des hommes liés au Prince, pour leurs combats de gladiateurs[101]. Toutefois, aucun d'eux ne songe à interdire le paganisme, et les masses païennes ne sont pas à proprement parler soumises à la persécution : il s'agit plus d'un encadrement dans le sens d'une restriction croissante des rites qui est imposé par le pouvoir impérial chrétien[Note 33]. Il est ainsi notable de constater que, même sous Constance II, plusieurs païens paraissent à la cour, à l'image du rhéteur Libanios, du philosophe et proconsul Thémistios ou encore de l'officier historien Ammien Marcellin.

Schismes et hérésies

Athanase d'Alexandrie est avec Hilaire de Poitiers le principal représentant du courant nicéen. L'un et l'autre sont exilés par Constance II qui cherche à imposer son symbole de Sirmium, fidèle à la doctrine arienne, au clergé tout entier.

Conformément à l'exemple donné par son père, Constance II, voyant l’Église confrontée au schisme donatien et surtout à l'hérésie arienne, se considère le devoir de veiller à en reconstituer l'unité autour d'une même profession de foi. Sous le règne de son père divers conciles avaient déjà été réunis sur cette délicate question de la consubstantialité — ou non — du Père et du Fils, le Seigneur et le Christ. On a vu que Constance II embrasse la cause arienne, à la différence de son jeune frère farouchement nicéen. Son triomphe sur Magnence de 353 lui permet d'imposer ses vues à toute la Chrétienté alors même que le soutien de l'évêque arien Ursace de Singidunum à la veille de la bataille de Mursa renforce son parti-pris en faveur des théories du défunt Arius. Constance souhaite d'abord écarter ses adversaires nicéens et fait ainsi déposer Athanase d'Alexandrie, évêque oriental et néanmoins l'un des plus farouches défenseurs de la consubstantialité, à la suite du concile d'Arles et au concile de Milan. En 356, Constance tente même de le faire arrêter mais l'évêque prend une troisième fois le chemin de l'exil tandis que l'armée investit Alexandrie pour soutenir le nouvel évêque, Georges de Cappadoce. Le vieil Ossius de Cordoue, qui avait conseillé Constantin durant le concile de Nicée, doit partir pour Sirmium, Paulin de Trèves, seul à avoir défendu Athanase au concile d'Arles est envoyé en Asie Mineure, tandis que Lucifer de Cagliari, Eusèbe de Verceil ou encore Denis de Milan sont eux aussi exilés en plein Orient arien. Le pape Libère est assigné à résidence à Véria de Macédoine, en 355, tandis que Constance II fait élire un nouvel évêque de Rome plus proche de ses idées en la personne de l'antipape Félix II.

Pour brutale qu'elle soit, cette politique amène néanmoins quelques résultats[102]. Ainsi, lors des conciles d'Arles et de Milan, une majorité des occidentaux se prononce en faveur de la déposition d'Athanase d'Alexandrie et les ariens finissent par obtenir d'Ossius de Cordoue, alors centenaire, une profession de foi se rapprochant quelque peu de la leur[102]. En parallèle de ces condamnations visant les plus résolus des nicéens, Constance veille à promouvoir la nouvelle profession de foi arienne par différents conciles notamment via la proclamation du symbole de Sirmium voué à remplacer celui de Nicée[102]. Toutefois, si l'arianisme semble être en passe de l'emporter, il se divise lui-même en plusieurs courants différents. La définition du nouveau symbole de Sirmium est ainsi tiraillée entre les anoméens, ou ariens radicaux, autour d'Ursace de Singidunum et de Valens de Mursa, pour qui Dieu et le Christ sont dissemblables, et les homéens, plus modérés, tel Basile d'Ancyre, pour qui ils sont globalement de substance semblable, mais pas identique comme l'avancent les nicéens. Ainsi, si le deuxième symbole de Sirmium, en 357 est porté par les anoméens, le synode d'Ancyre de 358 les dénonce comme hérétiques et pousse Constance II à réunir une nouvelle réunion à Sirmium qu'il préside et qui opte finalement pour une position de compromis, où la notion de substance est purement et simplement supprimée, position qui ne satisfait aucune des parties et ne règle pas le conflit[51].

Constance II, qui se considère comme « l'évêque des évêques »[102], entend donc bien contraindre, par la force de son autorité, les prélats récalcitrants, ariens comme nicéens, à professer cette idée controversée de la supériorité et de l'antériorité du Père. L'empereur arien n'a toutefois pas l'autorité de son père Constantin. Premier empereur à la croix, le règne de ce dernier coïncide par ailleurs avec la fin des grandes persécutions, ce qui lui permet d'être considéré, par nombre de chrétiens, comme un sauveur, un envoyé de Dieu pour défendre son Église et permettre son triomphe[103]. Lorsque Constance monte sur le trône, les circonstances ont changé, de sorte qu'il trouve face à lui un clergé chrétien organisé quoique divisé, et habitué depuis des décennies à bénéficier de la faveur impériale. Aussi, lorsque pour s'occuper des questions religieuses, il réunit différents conciles œcuméniques, ces grandes réunions des évêques de l'Empire, trouve-t-il ces derniers globalement moins disposés à se laisser dicter leur dogme par un simple chrétien fut-il grandi de l'autorité impériale[103]. N'ayant ni le prestige ni le sens de la diplomatie de son père[103], Constance II se montre maladroit et, sans parvenir à unir les ariens, s'aliène irrémédiablement le parti nicéen groupé principalement autour des évêques occidentaux qui ont connu dans Constantin et surtout dans le jeune Constant des soutiens indéfectibles. Ossius de Cordoue critique ainsi devant Constance les ingérences du pouvoir impérial dans les problèmes intérieurs de l'Église[Note 34]. Le célèbre prélat nicéen Hilaire de Poitiers, lui aussi un temps exilé en Orient, en vient même à comparer l'empereur ayant trahi le credo de Nicée à l'Antéchrist en personne. L'animosité de l'évêque est telle qu'il maintient un style agressif à l'encontre du Prince même après l'usurpation de Julien et la révélation de l'apostasie du nouveau souverain. Un signe que les haines entre chrétiens, nées des controverses sur la nature de la Trinité, se révèlent parfois plus vives que les tensions latentes entre chrétiens et gentils[104] et que l'Église au sortir du règne de Constance II demeure plus désunie que jamais[51].

Historiographie

Constance II a laissé peu de marques dans l'histoire romaine alors même qu'il est l'un des rares Princes à avoir connu un règne aussi long[1]. Ceci étant dit, l'empereur n'en apparaît pas moins dans de nombreux discours et tient naturellement sa place au sein des histoires de l'Empire et de l’Église qui sont rédigées dans la seconde moitié du IVe siècle et dans les siècles suivants, à Rome et Constantinople, même si le statut et la position des historiens tout autant que le contexte dans lequel ils écrivent changent radicalement les traits sous lequel il a pu être décrit. Très logiquement, les éloges panégyriques pour Constance, à l'image de ceux des philosophes et rhéteurs Thémistios et Libanios, parent ainsi sans modération l'empereur de toutes les qualités, réelles ou inventées, et, parce qu'ils sont lus directement à l'empereur, ne renseignent pas toujours avec objectivité. De même, il faut voir dans les deux discours de Julien César à Constance Auguste, rédigés durant les campagnes rhénanes, plus une protestation politique de loyauté de la part d'un homme qui se sait toujours vulnérable qu'une description véritablement sincère d'un empereur censé être l'archétype du Bon Roi hellénistique, un modèle vivant de divine philantropia[105]. Ainsi, si dans ces éloges, Constance rayonne de « l'éclat parfait de [s]a vertu », dans un texte postérieur, le Banquet, Julien Auguste l'assimile, à l'inverse, aux « meurtriers, sacrilèges, êtres infâmes »[Note 35]. D'une manière similaire, d'autres textes très circonstanciés peuvent tromper sur les impressions des contemporains à l'égard de leur Prince. Ainsi si Athanase d'Alexandrie invoque la « grandeur d'âme » d'un « roi juste » dans son Apologie de Constance[106], c'est pour que ce dernier accepte de céder aux demandes de son frère Constant et daigne le réinstaller sur son siège épiscopal à Alexandrie. Son nouvel exil et ses Discours contre les ariens permettent de renouer avec des prises de positions comparables à celles d'autres nicéens, à l'image d'Hilaire de Poitiers, dont on a vu qu'ils ont pu se montrer très durs à l'égard du champion de l'arianisme.

Plus que vis-à-vis de Constance lui-même, les écrits de ses contemporains sont surtout déterminés par leur position quant aux deux règnes qui encadrent le sien, celui de Constantin, premier empereur chrétien, et celui de Julien, dernier empereur païen. Grégoire de Nazianze animé d'une rancœur personnelle contre Julien fait ainsi de Constance, celui « des rois le plus épris du Christ », à la notable différence de l'Apostat[107]. Au contraire, le principal historien du règne de Constance, Ammien Marcellin, qui servit sous ses ordres dans les légions impériales, prend fait et cause pour Julien[108],[Note 36] de sorte que Constance y est ainsi décrit comme un « esprit borné et influençable » « ramenant tout à ses vues »[109]. De la même manière, les quelques historiens païens qui écrivent après la mort de Constance et Julien, et qui portent le témoignage du naufrage du paganisme, à l'image de Zosime, au Ve siècle, noircissent le portrait de Constance par contraste avec celui de son successeur immédiat. Zosime fait ainsi de Constance un homme cruel, en témoigne le massacre familial et la mise à mort de Gallus, et infidèle qui se lance dans sa dernière guerre civile par jalousie pour les succès de son César[110]. Dans le même temps, les chroniqueurs chrétiens, pourtant majoritairement nicéens[Note 37], en font, comme le byzantin Jean Zonaras, un homme clément et plein de tempérance. Tout au plus déplorent-ils, comme le fait Théodoret de Cyr, que le Prince ait abandonné « le droit chemin » sur les conseils perfides d'Eusèbe de Césarée[111] même s'ils décrivent l'empereur sur son lit de mort comme étant plein de regrets à l'idée d'avoir altéré la pureté du dogme[Note 38]. Tous s'accordent en revanche pour fustiger son entourage, ses eunuques, ses courtisans et ses femmes que critiquent Eutrope, et qui furent, pour Aurelius Victor, tout aussi pleins de « vices monstrueux » que l'empereur se révélait lui-même plein de « brillantes vertus »[112].

Les historiens modernes portent un regard qu'on peut espérer être plus apaisé sur la personnalité de l'empereur. Cet homme orgueilleux, qui se faisait appeler « Son Éternité » et qui se présente dans ses lettres à Chapour II comme « Constance, vainqueur sur terre et sur mer, Auguste à jamais »[113], est décrit comme dépassé par des responsabilités trop lourdes et écrasé par le souvenir de son père qu'il n'a sans doute jamais vu qu'en majesté. Lucien Jerphagnon le voit ainsi comme un « de ces fils de gens trop prestigieux et qui ne peuvent que descendre »[114] tandis que Marcel Le Glay le reconnaît comme un homme « ayant une haute idée de sa fonction et semble-t-il de ses devoirs » mais dénué du génie que cela aurait supposé[33]. Sans doute était-il comme le présente Paul Petit « une sorte de Philippe II d'Espagne dont il avait la piété, la chasteté laborieuse, le caractère soupçonneux, et l’orgueil du porphyrogénète »[82], à ceci près qu'il y ajoute une obsession permanente pour l'unité et les intérêts de l'Empire au point de faire, à l'heure de sa mort, de son ennemi d'hier son successeur désigné. Comme le résume finalement Jerphagnon, « Constance n'était certes pas sympathique, mais c'était un grand patron »[115].

Noms et titres

Noms successifs

  • 317, né FLAVIVS•JVLIVS•CONSTANTIVS.
  • 324, César : FLAVIVS•JVLIVS•CONSTANTIVS•CAESAR.
  • 337, Auguste : IMPERATOR•CAESAR•FLAVIVS•JVLIVS•CONSTANTIVS•AVGVSTVS.

Titres et titulaires

  • 324 : César[Note 39].
  • 326 : Consul avec Constantin.
  • 332 : Germanicus Maximus[Note 40].
  • 337 : Auguste.
  • 338 : Sarmaticus Maximus.
  • 339 : Consul II avec Constant.
  • 342 : Consul III avec Constant.
  • 343 : Adiabenicus Maximus[Note 41].
  • 346 : Consul IV avec Constant.
  • 352 : Consul V avec Gallus.
  • 353 : Consul VI avec Gallus.
  • 354 : Consul VII avec Gallus.
  • 356 : Consul VIII avec Julien.
  • 357 : Consul IX avec Julien.
  • 360 : Consul X avec Julien.

Bibliographie

Historiographie

Contemporains

Documents ultérieurs

Travaux contemporains

Sur l'Empire romain

  • François Zosso, Christian Zingg, Les empereurs romains : 27 av. J.-C. - 476 apr. J.-C., 1995, Éditions Errance, (ISBN 2877722260).
  • Lucien Jerphagnon, Histoire de la Rome antique : Les armes et les mots, 2002, Tallandier, (ISBN 2847340262).
  • Marcel LeGlay, Rome, t. II, Grandeur et chute de l'Empire, Éditions Perrin, , 892 p. (ISBN 978-2-262-01898-6).
  • Lucien Jerphagnon, Les Divins Césars : Idéologie et pouvoir dans la Rome impériale, 2010, Hachette Littérature.

Sur le Bas-Empire romain

  • Ernest Stein, Histoire du Bas-Empire, I, De l'État romain à l'État byzantin (284-476), 1959, éd. française par J.-R. Palanque, Desclée de Brouwer.
  • Arnold Hugh Martin Jones, Le déclin du monde antique, 1970, Histoire de l'Europe.
  • André Piganiol, L'Empire chrétien, 1972, PUF.
  • Paul Petit, Histoire générale de l’Empire romain, t. III Le Bas-Empire, Seuil, , 799 p. (ISBN 978-2-02-002677-2 et 2-02-002677-5).
  • (en) Timothy D. Barnes, The New Empire of Diocletian and Constantine, 1993, Books on Demand, (ISBN 978-0783722214).
  • André Chastagnol, Le Bas-Empire, 2000, Armand Colin. (ISBN 978-2200018511).
  • (en) Peter Garnsey, Averil Cameron, The Cambridge Ancient History, XIII, The Late Empire, A.D. 337–425, 1998, Cambridge University Press.
  • (en) David Potter, The Roman Empire at Bay : AD 180-395, Hardcover, , 762 p. (ISBN 978-0-415-10057-1 et 0-415-10057-7, lire en ligne).

Sur Constantin

  • (en) Arnold Hugh Martin Jones, Constantine and the Conversion of Europe, 1978, University of Toronto Press, (ISBN 978-0802063694).
  • (en) Timothy David Barnes, Constantine and Eusebius, 1981, Harvard University Press, (ISBN 978-0674165311).
  • Ramsay MacMullen, Constantine, Routledge, , 263 p. (ISBN 978-0-7099-4685-4).
  • (en) Charles Matson Odahl, Constantine and the Christian Empire, 2004, Routledge, (ISBN 978-0415174855).
  • (en) Hans A. Pohlsander, The Emperor Constantine, 2004, Routledge, (ISBN 978-0415319386).
  • Robert Turcan, Constantin en son temps, 2006, Faton.
  • Paul Veyne, Quand notre monde est devenu chrétien, Albin Michel, .

Sur Constance II

  • (en) R.C. Blockley, Constantius Gallus and Julian as Caesars of Constantius II, 1972, Latomus.
  • (de) Richard Klein, Constantius II. und die christliche Kirche, 1977, Impulse der Forschung, (ISBN 3534075420).
  • Chantal Vogler, Constance II et l'administration impériale, 1979, Université de Strasbourg.
  • (en) Timothy David Barnes, Athanasius and Constantius : Theology and Politics in the Constantinian Empire, 1993, Harvard University Press.
  • (en) Timothy David Barnes, Ammianus Marcellinus and the Representation of Historical Reality, 1998, Cornell University Press.
  • Pierre Maraval, Les Fils de Constantin, 2013, CNRS Éditions, (ISBN 978-2-271-07506-2).
  • Raphaël Dufour, La Politique Extérieure de Constance II (337-361), 2016, Université de Genève.

Sur les guerres perso-romaines

  • (en) Roger C. Blockley, East Roman Foreign Policy. Formation and Conduct from Diocletian to Anastasius, 1992, Leeds, (ISBN 0905205839).
  • (en) Michael H. Dodgeon, Samuel N. C. Lieu, The Roman eastern frontier and the Persian Wars (AD 226-363), 1994, Routledge, (ISBN 978-0415103176).
  • (en) Kaveh Farrokh, Shadows in the Desert : Ancient Persia at War, 2007, Osprey Publishing, (ISBN 978-1846031083).

Sur Julien

  • Joseph Bidez, La Vie de l'Empereur Julien, 1930, Société d'éditions « Les Belles Lettres ».
  • Guiseppe Ricciotti, Julien l'Apostat, 1959, Arthème Fayard.
  • Claude Fouquet, Julien, la mort du monde antique, 1985, Les Belles Lettres.
  • Jean Bouffartigue, L'Empereur Julien et la culture de son temps, 1992.
  • Pierre Renucci, Les idées politiques et le gouvernement de l'empereur Julien, 2000, Latomus.
  • Lucien Jerphagnon, Julien dit l'Apostat : histoire naturelle d'une famille sous le Bas-Empire, Texto, , 356 p. (ISBN 978-2-84734-746-3).

Articles historiques

Notes et références

Notes

  1. De la même manière que la dynastie constantinienne naissante avait lié son nom à celui des Illyriens, lorsque Constantin s'était inventé une parenté avec Claude II le Gothique, les Valentiniens, tout juste parvenus au pouvoir, essayeront de s'associer à la dynastie de ces premiers empereurs chrétiens. Valentinien Ier épouse ainsi une descendante de Crispus tandis que son fils Gratien est marié à la fille posthume de Constance II. Voir Charles Matson Odahl, Constantine and the Christian Empire, p. 247.
  2. Ce titre est calqué sur celui du souverain perse, sans doute Constantin voulait placer Hannibalien et Shapur II sur un pied d'égalité en prévision des échanges diplomatiques qu'ils devaient entretenir. Peut-être faut-il aussi y voir une manifestation des ambitions romaines sur le trône perse lui-même, qui aurait alors été confié à Hannibalien, alors que Constantin prépare sa grande expédition sur les traces d'Alexandre le Grand.
  3. Gallus, malade, aurait été considéré comme mourant par la troupe qui n'aurait pas jugé nécessaire de hâter son destin. Épargné en raison de sa grande jeunesse, ou plus simplement dissimulé à la vue des assassins, son jeune frère Julien a lui aussi la vie sauve. Voir Lucien Jerphagnon, Les divins Césars, p. 356.
  4. Julien considèrera dans sa lettre Au sénat et au peuple d'Athènes que Constance est le responsable officiel du massacre de sa famille
  5. La chronologie des événements fait là encore débat. André Piganiol place l'entrevue de Viminacium avant les massacres, ce qui aggrave encore la responsabilité des trois Césars, au premier lieu desquels Constance, dans le massacre familial qui s'ensuit. Jean-Rémy Palanque présente l'ordre inverse ce qui laisse la possibilité que les Césars n'aient fait que profiter d'une sédition militaire pour se débarrasser de deux rivaux et des autres branches de la famille constantinienne.
  6. Assiégée sans succès à trois reprises, en 338, 346 et 350, la ville fortifiée de Nisibe devait être, selon le mot de Paul Petit, le « Verdun de la Mésopotamie ». Voir Paul Petit, Histoire générale de l'Empire romain, III, Le Bas-Empire, p. 110.
  7. Eusèbe de Nicomédie avait baptisé Constantin sur son lit de mort et était le prélat qui avait signalé aux troupes le testament de l'empereur dénonçant ses pseudo-assassins. Arien notoire, il avait été placé par Constance II à la tête de l'évêché de Constantinople en violation du credo de Nicée, et en remplacement du nicéen Paul, exilé dans le Pont. Des émeutes éclatent durant lesquelles périt le magister equitum Hermogenes. Constance II se rend personnellement sur place et réprime les manifestants. Voir David Potter, The Roman Empire at bay, p. 463.
  8. Pour les dates, voir Michael H. Dodgeon,Samuel N. C. Lieu, The Roman eastern frontier and the Persian Wars (AD 226-363), p. 166-182, ainsi que (en) Itineraries of the Roman emperors, 337-361.
  9. Issu des réformes constantiniennes de l'armée romaine, le comitatensis semble avoir été non seulement une sorte de garde impériale au service du Prince mais également une véritable armée mobile ou d'intervention chargée de lutter plus efficacement contre le péril barbare où qu'il apparaisse. Voir à ce sujet Jean-Michel Carrié, « L'Empire-monde et les bases restaurées de la puissance », in L'Empire romain en mutation, p. 625-6.
  10. Constance, bon prince, l'envoie finir ses jours dans un palais de Prusa assorti d'une confortable rente et se pique même de le féliciter, dans une lettre personnelle, d'être délivré du fardeau du pouvoir. Voir Lucien Jerphagnon, Julien dit l'Apostat, p. 69.
  11. Eunape et Zosime en font un désastre majeur pour l'armée romaine qui perd une grande partie de ses meilleurs effectifs et qui expliquerait les succès des barbares dans la seconde moitié du IVe siècle. D'après Zonaras, l'historien byzantin, Magnence aurait perdu les deux tiers de son armée et Constance près de 40 % de la sienne.
  12. Lucien Jerphagnon estime qu'après avoir constaté la rapide propagation de l'usurpation qui avait coûté son trône et sa vie à son cadet, « il avait acquis dans cette aventure la dureté soupçonneuse des peureux cernés », voir Les Divins Césars, p. 357.
  13. Ces lignes d'avertissement sont peut-être un écho du mot de Tacite, « insociabile regnum », commentant, laconique, l'assassinat de Britannicus concurrent de Néron pour la succession impériale.
  14. Ammien Marcellin la qualifie de « mégère ». D'une manière globale, les sources contemporaines, à commencer par Ammien et Libanios sont accablantes pour Gallus. Voir Paul Petit, Histoire générale de l'Empire romain, III, Le Bas-Empire, p. 91.
  15. Paul Petit voit dans cette affaire la preuve de la rivalité entre les militaires occidentaux d'une part, et les fonctionnaires civils et orientaux d'autre part, à la cour de Milan. Pour Héloïse Harmoy Durofil, il s'agit plus de solidarités et de jalousies ethniques, Silvanus trouvant ainsi le soutien d'officiers francs ou d'origine franque comme lui ainsi que d'aristocrates d'origine campanienne, peut-être en rapport avec ses origines maternelles.
  16. La deuxième épouse de l'empereur, Eusebia, était sans doute stérile. Particulièrement épris, semble-t-il, Constance n'envisagea jamais le divorce. Voir Lucien Jerphagnon, Julien dit l'Apostat, p. 113.
  17. Julien avait su trouver dans l'impératrice, à sa grande surprise, une alliée conséquente auprès de l'Auguste Constance. Que ce soit par pur élan de sympathie, ou, comme l'estime Jerphagnon, pour trouver un successeur commode et manipulable le temps de faire naître et grandir un héritier, le soutien d'Eusebia ne se démentit jamais. Voir Lucien Jerphagnon, Julien dit l'Apostat, p. 127.
  18. Le prêtre Grégoire de Naziance dans son discours contre Julien de 363 l'accuse d'avoir sur les mains le sang de son cousin. Il est cependant la seule source contemporaine - et elles ne sont pas toutes favorables à Julien, tant s'en faut - à avancer cette hypothèse. Sans doute le prélat s'est-il laissé aveugler par son animosité personnelle à l'encontre du nouveau Prince aux sympathies pro-païennes particulièrement vives.
  19. Le baptême était vu comme effaçant les péchés antérieurs, Constantin avait sans doute à cœur de nettoyer son âme des souvenirs de Crispus et Fausta, Constance se purifiant quant à lui du massacre familial. Mais il faut aussi y voir une raison politique : les fonctions militaires et judiciaires d'un empereur exigeaient qu'il fasse occasionnellement verser le sang à une époque où la doctrine chrétienne demeure encore très axée sur la non-violence. Enfin, être baptisé était un pas supplémentaire - et non pas initial, même si le baptême à la naissance existait déjà - dans l'engagement d'un chrétien, qui était donc fréquemment donné à des hommes adultes qui acceptaient de se plier aux règles de l'Église. Or, l'empereur, aux yeux de Constantin, ne devait pas être soumis aux autorités religieuses : ainsi, Théodose, baptisé avant son avènement, dut plier face aux exigences d'Ambroise de Milan qui lui refusait la communion. Voir Paul Veyne, Quand notre monde est devenu chrétien, p. 96-7.
  20. « Au milieu de la stupéfaction dont le frappait cette réunion de prodiges, l'empereur se récriait contre l'insuffisance ou l'injustice des rapports de la renommée, si justement suspecte d'exagération en toute autre circonstance, et si fort au-dessous de la réalité dans tout ce qu'elle avait publié de Rome », Ammien Marcellin, Histoire romaine, livre XVI, chapitre X.
  21. « Se baissant, tout petit qu'il était, pour passer sous les portes les plus hautes, il portait toujours le regard devant lui, ne tournant non plus la tête ni les yeux que si son col eût été contenu entre des éclisses. On eût dit une statue. », Ammien Marcellin, Histoire romaine, livre XVI, chapitre X.
  22. Il ne reste rien de cette première Hagía Sophía incendiée en 404 lors d'une émeute entre différents chrétiens. Reconstruite puis de nouveau incendiée, cette fois lors de la sédition Nika en 532, c'est l'empereur Justinien qui confie aux architectes Isidore de Milet et Anthémius de Tralles la mission d'élever une basilique encore plus majestueuse, inaugurée en 537 et toujours visible aujourd'hui.
  23. Les différentes fonctions dans l'administration impériale sont énumérées dans la Notitia Dignitatum, un précieux document du Ve siècle, qui permet d'étudier leur articulation. Pour l'armée romaine tardive, voir Yann Le Bohec, L'armée romaine sous le Bas-empire, 2006, A&J Picard (ISBN 978-2708407657).
  24. Une plaisanterie courante racontait que si l'on voulait obtenir une faveur, il fallait aller la demander à l'empereur au motif qu'il passait pour avoir une certaine influence sur l'eunuque. Voir Lucien Jerphagnon, Julien dit l'Apostat, p. 109.
  25. S'opposant à l'impératrice et tentant de monter l'empereur contre son César, ils s'en font un ennemi d'autant plus redoutable qu'il accède finalement au pouvoir suprême. Jugés en décembre 361, les deux hommes et quelques autres à leur service sont condamnés à mort sous le nouvel empereur et détruits par le feu. Voir Lucien Jerphagnon, Julien dit l'Apostat, p. 232-3.
  26. Ammien n'est cependant pas toujours objectif dans la mesure où il prend de manière vigoureuse le parti de Julien qui avait eu à se plaindre durant son Césarat des agissements de Barbatio et Marcellinus. L'historien a également des raisons de se montrer dur contre ces officiers qui avaient écarté son supérieur Ursicin. Voir Paul Petit, Histoire générale de l'Empire romain, III, Le Bas-Empire, p. 90.
  27. En 310 encore, Constantin en pleine guerre civile se flattait d'avoir vu Apollon en songe lui promettre le succès dans toutes ses entreprises. Voir Paul Veyne, Quand notre monde est devenu chrétien, p. 93.
  28. Cette loi n'est peut-être qu'une réaffirmation d'une loi antérieure de Constantin. Voir Code théodosien, XVI, 10, 2 et 3, cité par Paul Veyne, Quand notre monde est devenu chrétien, p. 135.
  29. Le titre ne sera abandonné par les empereurs romains qu'à la suite de Gratien.
  30. Cette décision devait avoir des conséquences inattendues puisque l'affaire de l'autel de la Victoire cristallisera à la fin du siècle les tensions entre païens et chrétiens. Remis en place par Julien, retiré de nouveau par Gratien, il est réclamé par les sénateurs et le préfet Symmaque auprès de Valentinien II, Théodose et Eugène, qui, confrontés aux menaces du pape Damase et de l'évêque Ambroise de Milan, refuseront son retour. Finalement Honorius rend l'autel à la Curie, mais pas la statue.
  31. Paul Veyne estime leur nombre à seulement un dixième de la population totale de l'Empire à l'avènement de Constantin dans les années 310.
  32. Il convient de garder à l'esprit qu'en un siècle encore très majoritairement païen, les conversions à la religion du Christ puis l'entrée dans les ordres peuvent se produire à un âge suffisamment avancé pour que le nouvel ecclésiastique ait déjà une famille.
  33. La violente persécution de Dioclétien et de Galère, de 303 à 311, s'était achevée sur un terrible constat d'échec. Il semble qu'on ne puisse pas forcer les gens à croire sur commande. Fort de cette expérience, l'heure n'était plus vraiment aux grandes persécutions. Du reste Constantin et ses enfants auraient été bien mal avisés de persécuter la grande majorité de leurs loyaux sujets. Voir Paul Veyne, Quand notre monde est devenu chrétien, p. 145.
  34. Dans une lettre, qui nous a été retranscrite par Athanase, il aurait écrit à l'empereur : « Ne t’immisce pas dans les affaires de l'Église et ne nous commande pas à leurs propos ; mais apprends-les de nous. Dieu a mis en tes mains le royaume ; à nous, Il a confié les affaires de l'Église ».
  35. Dans ce texte qui décrit le défilé de tous les empereurs devant le tribunal des Dieux, Constantin se range finalement aux côtés de la Mollesse et de la Débauche, d'où son fils Constance promet la suppression de tous les péchés par le baptême ante-mortem. Sans doute Julien fait-il référence au fait, à ses yeux scandaleux, que, baptisé et donc purifié sur son lit de mort, Constance pouvait aspirer à paraître lavé de ses crimes devant son Dieu.
  36. Outre ce parti pris personnel, il est également notable qu'Ammien était païen et partant aurait pu avoir des raisons d'être mécontent de la législation des Constantiniens. Ceci étant dit, l'homme semble finalement s'être révélé assez indifférent, tant au christianisme d'un Constance qu'au néoplatonisme emmené par Julien.
  37. Philostorge est l'un des rares auteurs ariens dont nous ayons conservés quelques textes.
  38. Zonaras invente trois regrets qu'aurait prononcés l'empereur avant de trépasser : un cas de conscience pour son massacre familial, une erreur politique avec l'élévation de Julien au Césarat et le fait d'« avoir introduit une nouveauté dans la religion ».
  39. Pour cette chronologie, voir « Constance II » par Jona Lendering.
  40. Après la victoire de Constantin II sur les Wisigoths.
  41. Après la bataille de Singara contre les Sassanides.

Références

  1. Michael DiMaio, Jr., « Constance II » sur De Imperatoribus Romanis.
  2. Voir, par exemple, Paul Veyne, « Qu'était-ce qu'un empereur romain », in L'Empire gréco-romain, 2005, Seuil.
  3. Roger Rémondon, La crise de l’Empire romain, PUF, collection Nouvelle Clio – l’histoire et ses problèmes, Paris, 1964, 2e édition 1970, p. 137
  4. Petit 1974, p. 69
  5. MacMullen 1987, p. 187
  6. MacMullen 1987, p. 218
  7. MacMullen 1987, p. 220
  8. MacMullen 1987, p. 221-2
  9. MacMullen 1987, p. 222
  10. Michael DiMaior, Jr., « Constance II », in DIR.
  11. Charles Matson Odahl, Constantine and the Christian Empire, p. 226.
  12. André Chastagnol, Le Bas-Empire, p. 119.
  13. Aline Rousselle, « La rupture constantinienne », 4, L'Empire romain en mutation, p. 253.
  14. Lucien Jerphagnon, Les Divins Césars, p. 353.
  15. Charles Matson Odahl, Constantine and the Christian Empire, p. 245.
  16. Potter 2005, p. 460
  17. Lucien Jerphagnon, Les Divins Césars, p. 355.
  18. Petit 1974, p. 87
  19. Jerphagnon 2010, p. 39
  20. LeGlay 2005, p. 529
  21. Potter 2005, p. 462
  22. Potter 2005, p. 467
  23. Petit 1974, p. 88
  24. LeGlay 2005, p. 530
  25. Petit 1974, p. 98
  26. Felicium temporum reparatio, voir Charles Matson Odahl, Constantine and the Christian Empire, p. 247.
  27. Michael DiMaio, Jr., « Constance II », in DIR.
  28. Kaveh Farrokh, Shadows in the Desert: Ancient Persia at War, p. 202.
  29. Potter 2005, p. 471
  30. Jerphagnon 2010, p. 67
  31. Jerphagnon 2010, p. 68
  32. Petit 1974, p. 89
  33. LeGlay 2005, p. 531
  34. Potter 2005, p. 473
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  36. Petit 1974, p. 91
  37. Jerphagnon 2010, p. 47
  38. Jerphagnon 2010, p. 71
  39. Ammien Marcellin, Histoire romaine, XIV, 11.9, cité par Lucien Jerphagnon, Les Divins Césars, p. 359.
  40. Jerphagnon 2010, p. 101
  41. Jerphagnon 2010, p. 102
  42. Jerphagnon 2010, p. 103
  43. Jerphagnon 2010, p. 104
  44. Petit 1974, p. 92
  45. Potter 2005, p. 481
  46. Jean-Pierre Joly, « Le premier roi des Francs. La loi salique et le pouvoir royal à la fin de l'Empire », in Auctoritas: mélanges offerts à Olivier Guillot, vol. 33 de Cultures et civilisations médiévales, p. 118.
  47. Potter 2005, p. 482
  48. Voir à ce sujet C. A. Balducci, « La ribellione del generale Silvano nelle Gallie », Rendiconti Academia dei Lincei, ser. 8, 2, 1947.
  49. Jerphagnon 2010, p. 126
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  51. Petit 1974, p. 100
  52. Jerphagnon 2010, p. 147
  53. Jerphagnon 2010, p. 150
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  59. Philippe Richardot, La fin de l'armée romaine 284-476, p. 152.
  60. Petit 1974, p. 110
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  68. Jean-Michel Carrié, « Évolutions sociologiques et emprise du pouvoir », 10, L’Empire romain en mutation, p. 714-5.
  69. Jean-Michel Carrié, « Évolutions sociologiques et emprise du pouvoir », 10, L’Empire romain en mutation, p. 715.
  70. Jerphagnon 2010, p. 157
  71. LeGlay 2005, p. 532-4
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  74. Alan K. Bowman, Peter Garnsey, Averil Cameron, Cambridge Ancient History, 12, The Crisis of Empire, A.D. 193–337, p. 101.
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  76. Georges Depeyrot, La monnaie romaine : 211 av. J.-C. - 476 apr. J.-C. , Editions Errance, 2006, 212 pages, (ISBN 2877723305), p. 170
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  78. Veyne 2007, p. 135
  79. Code théodosien, XI, 36, 4.
  80. Aline Rousselle, L’Empire romain en mutation, 5, La perturbation des mœurs, p. 336-7.
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  83. Jerphagnon 2010, p. 109
  84. Marcel LeGlay, Rome, II, Grandeur et chute de l'Empire, p. 535.
  85. Code théodosien, XVI, 10, 4, cité par André Piganiol, L'Empire chrétien, p. 107-8.
  86. Code théodosien, XVI, 10, 5.
  87. (en) Jean-Rémy Palanque, The Church in the Christian Roman Empire : The church and the Arian crisis, Oates & Washbourne, , p. 226
  88. Code théodosien, XVI, 10, 6.
  89. Code théodosien, XVI, 9, 6.
  90. Code théodosien, XVI, 9, 2.
  91. Code théodosien, XVI, 8, 7.
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  95. Code théodosien, XVI, 2, 8.
  96. Code théodosien, XVI, 2, 9.
  97. Code théodosien, XVI, 2, 14.
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  99. Veyne 2007, p. 132
  100. Veyne 2007, p. 28
  101. Veyne 2007, p. 27-8
  102. Petit 1974, p. 99
  103. Potter 2005, p. 486
  104. Potter 2005, p. 507
  105. Jerphagnon 2010, p. 159-160
  106. Athanase, Apologie de Constance, 2.
  107. Jerphagnon 2010, p. 214
  108. Jerphagnon 2010, p. 142
  109. Ammien Marcellin, Histoire romaine, XIV, 5.2 et 11.16
  110. Zosime, Histoire nouvelle, livre II et III.
  111. Théodoret de Cyr, Histoire ecclésiastique, livre II, chapitre III.
  112. Aurelius Victor, De Caesaribus, XLII.
  113. Jerphagnon 2010, p. 56
  114. Lucien Jerphagnon, Les Divins Césars, p. 359.
  115. Jerphagnon 2010, p. 143

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